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À Alger, l’IATF révèle les lignes de fracture et de recomposition au Maghreb

Par Lyas Amara 4 septembre 2025
Ahmed Attaf a utilisé le "langage des chiffres" pour faire un bilan très positif de l'IATF-2025

Alger abrite, à partir de ce jeudi jusqu’au 10 septembre prochain, la Foire commerciale intra-africaine (IATF), vitrine de l’ambition de l’Union africaine de stimuler les échanges entre pays du continent. Ce rendez-vous auquel participent de nombreux chefs d’États, de ministres et de hauts responsables africains, constitue une tribune pour le renforcement des investissements et des partenariats intra-africains ainsi qu’un espace de valorisation des capacités de production des pays du continent dans la perspective de construire un espace économique et commercial unifié.

Mais au-delà de l’économie, le rendez-vous prend une dimension politique avec la présence remarquée de plusieurs chefs d’État maghrébins : l’Algérien Abdelmadjid Tebboune, le Tunisien Kaïs Saïed, le président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani et le président du Conseil présidentiel libyen Mohamed Younes El-Menfi.

Absence du Maroc

Cette image d’un noyau maghrébin rassemblé à Alger contraste avec certaines absences, au premier rang desquelles celle du Maroc. Rabat, pourtant l’une des principales économies africaines et acteur incontournable dans les échanges intra-continentaux, est de plus en plus marginalisé des initiatives régionales portées par Alger. Engagé dans une tension permanente avec Alger, en brouille avec Tunis, Rabat a préféré tourné le dos à la construction maghrébine au profit d’alliances susceptibles de conforter son obsession d’enterrer la question sahraouie. L’absence marocaine illustre en tous cas la profondeur du gel diplomatique entre les deux capitales et l’échec durable de l’Union du Maghreb arabe (UMA), paralysée depuis des décennies par les antagonismes politiques.

Le prolongement du mini-sommet tripartite

La rencontre d’Alger n’est pas une première : Tebboune, Saïed et El-Menfi avaient déjà jeté les bases d’une concertation maghrébine restreinte lors d’une réunion tripartite en avril dernier à Tunis. Présentée comme un cadre de dialogue pragmatique, cette initiative visait à compenser l’immobilisme de l’UMA en se concentrant sur des objectifs concrets : développement des zones frontalières, sécurité collective face aux menaces transnationales, coordination sur la migration irrégulière et relance des échanges commerciaux et de la coopération énergétique.

Le format, surnommé « G3 maghrébin », traduisait la volonté des trois pays de prendre leur destin régional en main, quitte à acter la mise en sommeil d’une organisation maghrébine élargie devenue lettre morte.

La Mauritanie, nouvelle variable de l’équation

La nouveauté de ce sommet économique est la participation du président mauritanien, absent lors du lancement du G3. Sa présence à Alger aux côtés de ses homologues algérien, tunisien et libyen peut prêter le flanc aux spéculations : la Mauritanie pourrait-elle rejoindre cette dynamique et transformer le triptyque en « G4 » maghrébin ? L’implication de Nouakchott, traditionnellement prudente, donnerait une légitimité supplémentaire à cette entité émergente, tout en isolant davantage le Maroc.

Certains observateurs n’excluent pas que les dirigeants profitent de leur présence simultanée à Alger pour tenir une réunion en marge de l’IATF, prolongeant l’expérience de Tunis. Cela permettrait de tester la solidité du format et d’esquisser une feuille de route commune.

Une initiative encore fragile

La question demeure : ce cadre peut-il survivre aux turbulences politiques régionales ? La Tunisie traverse une grave crise économique et institutionnelle, la Libye reste empêtrée dans une transition chaotique, et l’Algérie elle-même est confrontée à des défis internes et à une rivalité frontale avec Rabat. Dans ce contexte mouvant, la viabilité du mini-sommet dépendra de la capacité des quatre pays à transformer une solidarité de circonstance en coopération durable.

Les enjeux sont immenses : stabilisation des frontières, lutte contre les trafics transfrontaliers, sécurité alimentaire, coopération énergétique, intégration économique africaine. Mais l’histoire du Maghreb enseigne la fragilité des projets d’unité régionale, souvent contrariés par les rivalités politiques.

À Alger, l’IATF offre donc plus qu’une vitrine économique : elle devient le miroir des recompositions en cours dans la région. Reste à savoir si ce G3 qui pourra être élargi éventuellement à la Mauritanie marquera la naissance d’un nouvel espace de convergence, ou s’il rejoindra la longue liste des expériences avortées d’intégration maghrébine.

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