Abdelaziz Bouteflika : 50 jours pour osciller entre le Shah d’Iran et un sursaut de dignité

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Abdelaziz Bouteflika : 50 jours pour osciller entre le Shah d’Iran et un sursaut de dignité

Par Maghreb Émergent
8 mars 2019

Le président Algérien peut finir déchu et peut être en exil, s’il persiste à maintenir sa « réélection » du 18 avril et à en payer le cout politique. Il peut aussi faire autre chose.

La possibilité pour le président Algérien de se maintenir au pouvoir au delà de la fin de son mandat actuel est très faible. Si elle existe, elle passe par un affrontement direct avec le peuple qui vient de montrer, lors d’une journée du 08 mars au retentissement mondial, qu’il est déjà ailleurs. A Alger par centaines de milliers, dans le pays en cumulé par millions, les Algériens ont raconter un avenir collectif qui ne passe plus par l’agenda des élections du 18 avril. Ni par un autre, écrit par le pouvoir seul. Persister signifie passer en force. Donc réprimer violemment. Nous serions dans une séquence iranienne. A la fin de l’été 1978 le Shah d’Iran a beaucoup hésité avant d’autoriser ses généraux à se déployer face aux manifestations populaires et à utiliser les armes. Il s’en est repenti avant de quitter le pays, en janvier 1979, mais sa chute n’en était devenue que plus lourde pour le système impérial et sa noblesse. Le contexte de cette révolution tranquille en Algérie est bien sur différent. Abdelaziz Bouteflika n’a en réalité que peu de moyens de passer en force si la tentation lui en venait. Il vaut mieux donc parler de l’autre scénario, celui ou, au lieu de nommer un Shapour Bakhtiar – trop peu , trop tard – au poste de premier ministre avant de fuir, il ferait, aidé de son clan, un geste pour sauver ce qui peut encore l’être de sa dignité.

Faire mieux que Bendjedid.

50Ce qui, depuis plusieurs jours, se discute dans les conclaves sur les hauteurs d’Alger c’est le mécanisme de sortie du 18 avril. Le motif du report des élections est là. Aucune campagne électorale n’est, de fait, possible,

dans ce contexte révolutionnaire. Mais comment les stopper en y mettant un peu de formalisme juridique ?  L’armée ne veut pas directement s’impliquer dans un nouveau arrêt du processus électoral, même si celui si est une revendication populaire. Il faudra passer par les civils. L’option la plus fluide est bien sur le rejet de toutes les candidatures dans trois jours par le conseil constitutionnel. Celle de Bouteflika viendrait par le canal du vice médical. Les autres candidats en conformité seraient sacrifiés pour ne pas permettre la poursuite du processus. Il faudrait que le chef d’Etat major exerce une pression directe sur le président du conseil constitutionnel,  Tayeb Belaiz, pour espérer une telle issue. Peu probable.  Il reste alors une dernière issue. Par le haut. Celle qui verrait le clan Bouteflika prendre la vague de la révolution, utiliser les 50 jours restants du mandat présidentiel pour mettre en place la feuille de route de  la transition et s’en aller. Cela passerait bien sur par le report du vote, puis le départ du gouvernement lié au 5e mandat. Le président , en réalité son frère et son entourage, peut ouvrir une négociation avec l’opposition pour former un gouvernement d’’union nationale avec comme feuille de route de convoquer une conférence nationale avant la fin du mandat présidentiel et d’en faire l’émanation de la feuille de route de la transition institutionnelle. En un mot, Abdelaziz Bouteflika peut encore faire mieux que Chadli Bendjedid après octobre 88. Il peut donner les instruments de la transition au peuple et ne pas rester pour tenter de la conduire comme l’a fait Bendjedid.

50 jours pour lancer la transition

Un sursaut de dignité pour sauver sa postérité. Voilà le dernier recours qui reste au président Bouteflika dont plusieurs affiches de manifestants appelaient aujourd’hui à le jeter dans la poubelle de l’Histoire. Sort dont il se rapproche à grande allure, peut être sans en mesurer l’imminence, lui et son clan familial. Ce sursaut de dignité signifierai de prendre immédiatement l’initiative du lancement de la transition dans l’espace-temps des 50 jours de présidence légale qui lui demeure. Le conseil constitutionnel ne devrait même pas avoir le temps de rendre son compte rendu sur la validité des candidatures. Le président – son clan- annoncerait qu’elles sont reportées. Et que, bien sur, il n’est plus concerné par la prochaine échéance électorale. La formation d’un gouvernement d’union nationale pourrait intervenir au bout d’une semaine de négociation , car l’opposition est déjà en configuration d’en parler, entre elle et avec le pouvoir. La conduite de ce gouvernement reviendrait bien sur à une personnalité validée par le mouvement populaire. En réalité par plusieurs points, cette feuille de route du sursaut de la dignité reprendrai des points qui figurent dans la lettre de demande de sursis lu par Abdelghani Zaalane aux Algériens dimanche dernier. La différence est simple. Bouteflika réalise une partie de cette feuille de route avant de partir fin avril, et non pas après sa réélection le 18. 

Une journée vitrine atout pour partir

La journée matricielle de ce vendredi 08 mars qui va changer l’Algérie, est un atout pour un sursaut in extrémis du clan présidentiel. Il n’y a presque  pas eu de répression. Les images d’un peuple en liesse, conjugué au féminin, ont interpellé le monde. Il s’agissait de manifestations politiques de rupture.  Cette journée- vitrine a donné des garanties au pays et à ses partenaires étrangers sur la consistance du mouvement en cours. Elle a récité une disposition flagrante des Algériens, à la citoyenneté, à la modernité politique et à la réhabilitation du vivre ensemble. Abdelaziz Bouteflika peut – même abusivement – encore tenter d’émarger au mérite de cette éclosion sociétale éblouissante. Les Algériens lui pardonneront qu’il le fasse si c’est pour qu’il mette le pays à l’abri. En déclenchant aussitôt le processus de son départ négocié avec la partie de l’opposition la plus proche de l’expression populaire de ces dernières semaines.  Il y’a, en vérité peu de chance qu’il le fasse, lui et son clan. Peu de chances mais pas aucune chance. Le plus probable serait qu’il se désigne lui même une sortie torturée à la manière du dernier des Pahlavi, le sang de la répression en moins. Pour ce qu’il lui reste à vivre, Abdelaziz Bouteflika pourrait s’infliger l’exil plutôt que de s’envisager remettre aux algériens les clés institutionnelles d’un après Bouteflika apaisé heureux, et lyrique pour ses débuts. Il serait alors très en dessous de Chadli Bendjedid dans l’examen de la postérité.

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