L’accord s’applique provisoirement dès sa publication, dans l’attente de ratifications nationales, et prévoit un examen conjoint annuel de ses effets économiques et sociaux.
Publié le 3 octobre 2025 au Journal officiel de l’Union européenne, le nouvel accord agricole conclu entre Rabat et Bruxelles tente de lever les incertitudes qui entouraient depuis plusieurs années le commerce des produits provenant de ces territoires. Signé à Bruxelles sous la forme d’un échange de lettres, le texte modifie les protocoles n° 1 et n° 4 de l’accord d’association de 1996 et étend officiellement les préférences commerciales européennes aux produits soumis aux contrôles douaniers du Royaume du Maroc, quelle que soit leur région d’origine.
L’arrangement vise à répondre à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dont un arrêt rendu en octobre 2024 avait suspendu l’application de l’accord précédent aux produits du Sahara occidental. L’Union et le Maroc ont cherché une formule capable de concilier le droit européen et la continuité d’un partenariat économique jugé stratégique. Les exportations agricoles en provenance de Dakhla, Laâyoune ou Boujdour continueront ainsi de bénéficier des mêmes conditions tarifaires que celles d’Agadir ou Casablanca, dès lors qu’elles relèvent des autorités marocaines.
Bruxelles tente -t-elle de contourner la jurisprudence européenne?
Pour répondre aux exigences de transparence formulées à Bruxelles, le texte introduit une innovation : les certificats d’origine devront préciser la région exacte de production, et les fruits et légumes porteront un étiquetage géographique détaillé. Cette mesure, présentée comme un gage de clarté pour les consommateurs européens, consacre de facto l’intégration économique des territoires occupés dans le marché marocain, insistent plusieurs juristes européens.
L’accord s’applique provisoirement dès sa publication, dans l’attente de ratifications nationales, et prévoit un examen conjoint annuel de ses effets économiques et sociaux. Ce suivi doit permettre de vérifier que les bénéfices tirés de l’accord profitent effectivement aux populations locales. Bruxelles promet des soutiens financiers ciblés dans les domaines de l’eau, de l’énergie et du développement durable, tandis que Rabat y voit la consolidation d’une reconnaissance implicite de son espace économique. « Ce n’est pas un texte politique, mais il envoie des signaux forts », a déclaré le ministre marocain des affaires étrangères, Nasser Bourita.
Pour l’Union, il s’agit avant tout de préserver un partenariat jugé essentiel avec le Maroc, tout en se prémunissant de nouveaux recours devant la justice européenne. Le compromis, présenté comme technique mais porteur d’enjeux politiques, cherche à stabiliser un contentieux ancien sans pour autant clore le débat sur le statut du Sahara occidental , un territoire toujours reconnu par les Nations unies comme non autonome.