Face à une sécheresse historique aggravée par le changement climatique, le Maroc a fait du dessalement de l’eau de mer une solution stratégique, notamment dans la région agricole du Souss-Massa, au sud du pays. Si cette technologie permet de préserver des milliers d’emplois et de maintenir une production maraîchère tournée vers l’export, elle suscite également des critiques en raison de son coût élevé et de son impact environnemental.
Une réponse indispensable à la crise hydrique
Depuis 2018, le Maroc subit une sécheresse persistante qui menace l’agriculture, un secteur représentant environ 12 % du PIB. Dans la plaine de Chtouka, près d’Agadir, les exploitations agricoles comme celles du groupe franco-marocain Azura, spécialisé dans la tomate cerise, dépendent désormais entièrement de l’eau dessalée.
La station de dessalement d’Agadir fournit depuis 2022 plus de 275.000 m³ d’eau par jour, dont près de la moitié pour l’agriculture. Selon les spécialistes, cette infrastructure a permis d’éviter un « scénario catastrophique ». De son côté, le ministère de l’Agriculture estime qu’elle a contribué à préserver plus d’un million d’emplois et à éviter la perte de plus de 860 millions d’euros en valeur ajoutée.
Pour les grands exploitants, cette ressource a permis d’agrandir les surfaces cultivées et de sécuriser les exportations.
Un modèle critiqué pour son coût et son impact écologique
Mais cette solution technologique reste inabordable pour une grande partie des petits agriculteurs. L’eau dessalée coûte près de cinq fois plus cher que l’eau conventionnelle : 0,48 euro le m³, malgré des subventions publiques.
Des agronomes cités par la presse locale soulignent que seules les cultures à haute valeur ajoutée, comme les tomates ou les arbres fruitiers, peuvent absorber un tel coût. Ils dénoncent aussi la forte consommation énergétique des usines de dessalement et les rejets de saumure, nocifs pour les écosystèmes marins.
Les autorités assurent de leur côté que des dispositifs de dilution sont en place et qu’aucun effet néfaste n’a été constaté autour d’Agadir.
Aujourd’hui, le Maroc compte 16 stations de dessalement, avec une capacité annuelle de 270 millions de m³. Le pays ambitionne d’atteindre 1,7 milliard de m³ d’ici 2030.