L’Algérie mise sur le stockage pour réduire sa vulnérabilité face aux fluctuations des marchés internationaux. Seize silos destinés à l’Office algérien interprofessionnel des céréales doivent être livrés avant la fin du premier semestre 2026, un projet qualifié d’“arme stratégique” par le professeur Brahim Mouhouche, membre du Conseil supérieur de la recherche scientifique et des technologies.
Disposer de réserves couvrant environ neuf mois de consommation nationale, c’est l’objectif visé par ce projet. Une capacité qui permettrait au pays de profiter des baisses de prix sur les marchés mondiaux sans être limité par un manque d’espace de stockage.
“Un pays qui a les moyens d’acheter et si à un certain moment les prix sont abordables, il achète une quantité très importante. Mais s’il n’a pas de silo, même s’il le veut, il ne peut pas, il va perdre tout ce qu’il va acheter”, a expliqué l’expert mardi lors de son passage à l’émission “L’invité du jour” de la Chaîne 3 de la Radio algérienne.
Pour Mouhouche, un pays sans capacités de stockage adéquates se trouve dans une position doublement vulnérable : il manque de réserves en cas de crise et ne peut pas tirer parti des opportunités commerciales. Il rappelle qu’à l’échelle mondiale, les stocks représentent le double de la consommation annuelle, avec des milliards de tonnes entreposées en permanence.
Un automne pluvieux, une opportunité rare
Ce renforcement des infrastructures intervient dans un contexte climatique exceptionnel. Cet automne, les précipitations ont largement dépassé la moyenne, une situation que l’Algérie n’avait pas connue depuis une dizaine d’années. Selon le professeur Mouhouche, cette abondance d’eau ouvre des perspectives prometteuses pour la campagne agricole en cours, notamment pour les millions d’exploitants qui ne disposent pas de systèmes d’irrigation.
À la même période en 2023, un stress hydrique important empêchait les agriculteurs d’accéder à leurs champs. Cette année, certains rencontrent le problème inverse : trop d’eau dans les sols retarde les travaux. L’expert souligne néanmoins l’importance d’alterner pluies et accalmies pour permettre aux exploitants d’intervenir avec leurs engins.
Si les barrages, actuellement remplis à moins de 40 %, ont besoin de précipitations continues pour reconstituer leurs réserves, les agriculteurs ont besoin de séquences plus courtes. “Il suffit qu’il y ait deux jours, trois jours sans pluie pour permettre aux exploitants de travaille”, précise Mouhouche, tout en rappelant qu’à 95 % des cas, la pluie reste bénéfique pour l’agriculture.
Un soutien budgétaire massif
Pour accompagner ces évolutions, l’État maintient un effort financier considérable. Près de six milliards de dollars sont prévus dans la loi de finances pour soutenir le secteur agricole, avec des subventions atteignant 50 % pour certaines productions. Parmi les mesures récentes figure la facilitation de l’importation de matériel agricole, y compris d’occasion, censée renforcer la mécanisation jugée indispensable au développement du secteur.
Selon Mouhouche, l’Algérie se distingue par l’ampleur de son soutien aux agriculteurs, au point qu’il estime qu’il n’y a “pas beaucoup de pays pour ne pas dire qu’il n’y a pas de pays qui subventionne, qui aide autant”.