L’AAPI mise 2,6 milliards de dollars sur les pneus et pièces de rechange pour briser la dépendance aux importations.
Mercredi 24 décembre 2025, Dar Algérie à la SAFEX a accueilli la journée d’étude organisée par l’Agence Algérienne pour la Promotion de l’Investissement (AAPI). Sous le slogan « Orienter l’investissement pour un produit local fort et diversifié », cette rencontre, dans le cadre de la 33e édition du Salon de la Production Algérienne, cible les projets de substitution aux importations.
L’État y trace une stratégie pour réduire les 38,86 milliards de dollars d’importations annuelles substituables, renforcer l’autonomie industrielle et mettre fin aux pénuries de pneus et de pièces de rechange. Les chiffres de l’AAPI dessinent un pari massif : 61,1 milliards de dollars d’investissements déclarés pour 19 054 projets et 465 481 emplois, portés à 98% par le capital national.
Des chiffres ambitieux, une réalisation incertaine
Les données de l’AAPI montrent que 18 745 projets locaux (51,6 milliards de dollars, 426 269 emplois) dominent le portefeuille, contre 309 initiatives étrangères plus capitalistiques (9,5 milliards). Parmi eux, 7 656 projets (27,4 milliards de dollars, 272 655 emplois) visent la substitution aux importations, touchant 144 activités et 673 produits (dont 535 exportables).
La sidérurgie-métallurgie-mécanique représente 14,1 milliards de dollars substituables, suivie de la chimie-caoutchouc-plastiques (6,8 milliards) et de l’agroalimentaire (5,4 milliards). Ces chiffres restent déclarés : la concrétisation exige des mois, voire des années, en maîtrise technique, infrastructures et coordination. Passer de la promesse à la production n’est pas une formalité, surtout pour des filières complexes où l’Algérie peine historiquement.
Pneus et pièces de rechange : 2,6 milliards pour briser la dépendance
Les secteurs qui pèsent sur les citoyens depuis des mois concentrent un investissement de 2,6 milliards de dollars. Pour les pneus, 7 projets mobilisent 2,28 milliards de dollars et 7 259 emplois, visant 20 millions d’unités annuelles (dont 5 millions pour poids lourds), contre 7,2 millions importées pour 347,3 millions de dollars. Les pièces de rechange suivent avec 158 projets (373,2 millions de dollars, 7 994 emplois), ciblant 70,4 millions d’unités importées à 426,6 millions de dollars.
Ces montants traduisent l’urgence : l’Algérie, importatrice chronique, subit pénuries, hausses de prix et sorties de devises massives. En cas de succès, ces initiatives couvriraient la demande interne et ouvriraient l’export régional. En cas d’échec, elles deviendraient des surcapacités coûteuses. L’État, via l’AAPI, priorise ces filières pour un impact social immédiat : baisser les coûts pour les transporteurs et les ménages, relancer l’industrie mécanique.
Entre ambition et réalité
L’analyse des chiffres montre les limites : 95% des importations (36,87 milliards) sont « substituables » sur le papier, mais exigent technologies, normes internationales et économies d’échelle que le tissu local ne maîtrise pas encore. Les projets phares comme les filtres (146,6 millions de dollars pour 150 millions d’unités) ou canettes (44,6 millions pour 800 millions) visent l’exportation, mais sans débouchés extérieurs, ils risquent de saturer le marché national, érodant marges et emplois.
L’État mise sur un suivi rigoureux, des incitations fiscales et l’innovation pour transformer ces engagements en réalité. Les citoyens attendent du concret : fin des crises pneus-pièces, produits abordables, emplois stables.