Algérie - La rancœur des sherpas : l’Ugta n’a pas bien négocié son soutien politique | Maghreb Émergent

M A G H R E B

E M E R G E N T

Maghreb

Algérie – La rancœur des sherpas : l’Ugta n’a pas bien négocié son soutien politique

Par Maghreb Émergent
18 mars 2014
Sidi Said
Sidi Saïd, SG de l'UGTA: pour les sherpas la direction a raté une opportunité (dr)

Sidi Said

La Tripartite a laissé un gout amer chez les « sherpas » de l’UGTA qui estiment que la direction du syndicat qui ne « pouvait se soustraire au soutien à Bouteflika » aurait pu mieux négocier.

« Tout le travail que nous avons fait en commission pour préparer cette tripartite a été évacué d’un revers de main au motif que dans cette conjoncture seul compte le soutien à Bouteflika », rage un dirigeant de la fédération UGTA des textiles et cuirs et membre d’une commission qui a préparé la 16ème tripartite. Il déplore que le travail effectué pour contrer le discours dominant sur l’impact présumé d’une suppression de l’article 87 bis ait été mis sous le boisseau. « Nous avons effectué toutes les simulations pour démontrer que l’incidence de la suppression de l’article 87 bis est tout à fait supportable par les entreprises à condition de faire un redéploiement des dépenses » souligne-t-il. « Les dirigeants de l’UGTA qui ont travaillé avec nous à l’instar des secrétaires nationaux Malki, Djenouhet ou Takjout ont exposé, à plusieurs reprises, devant les médias, la faisabilité d’une telle décision ». Mais l’aspect « politique » de la tripartite avait été d’emblée balisé par Abdelmalek Sellal qui évoquait les « principes cardinaux » de l’action du président Abdelaziz Bouteflika qui sont les « gages de la stabilité et du progrès de notre nation ». Il fallait donc que les travaux de la 16e tripartite, gouvernement-UGTA-patronat prenne les décisions « devant servir notre économie nationale et la nation », selon la formule de Sellal. Pour le syndicaliste et nombre de ses camarades, il y avait une opportunité pour mieux négocier « L’UGTA qui ne pouvait se soustraire au soutien à la candidature de Bouteflika tenait précisément une opportunité pour arracher des concessions en faveur du monde ouvrier ». Elle l’a ratée, selon lui.

UGTA : une faillite historique

Le bilan est maigre, fulmine-t-il : pas d’augmentation de salaire, pas de baisse de l’IRG et pas de suppression du fameux 87 bis, renvoyé à une reformulation dans le cadre de la loi de finances 2015. Pas même le retour au crédit à la consommation pour les produits dont l’intégration nationale est jugée importante, elle aussi renvoyée à l’étude en commission. Même la question des mutuelles est passée à la trappe, note-t-il écœuré. « Toutes ces pistes de mesures ont pourtant nourri les discussions et des espoirs au sein des collectifs ouvriers et dans les structures syndicales de base ».

Une chose est sure et, les cadres syndicaux le disent : plus l’UGTA s’éloigne de l’encadrement de la contestation sociale plus la signature d’un pacte social et économique devra impliquer d’autres représentants du monde du travail qui ont montré leur capacités de mobilisation. De fait, les mouvements chez les chômeurs, des jeunes du pré emploi, les grèves et les débrayages dans la fonction publique, l’éducation, la santé et dans les entreprises à l’instar de Sider, ou de ce qui reste du Textile et l’Agro-alimentaire, échappent totalement à l’appareil syndical officiel. Le maintien de structures bureaucratiques dans la plupart des entreprises publiques est sans effet sur l’érosion du rôle réel du syndicat. Les syndicalistes l’admettent, pour cette tripartite, l’UGTA ne s’est pas seulement heurtée aux mises en garde du gouverneur de la Banque d’Algérie sur le « gonflement » des dépenses publiques, émises précisément à la veille de ce réunion. Le vrai problème de l’Ugta, conviennent-ils, tient surtout à sa perte de représentativité dans les secteurs dynamiques de la vie économique et sociale du pays.

 2006 et 2014 : le même constat mais pas les mêmes moyens

Pour ces cadres syndicalistes, la cause est entendue. Le pacte de croissance annoncé lors de cette 16ème tripartite est « un remake du pacte économique et social conclu en 2006 qui a pour objectif de brider tout revendication de revalorisation des salaires au motif de la contrepartie de la croissance ».  La problématique est la même : « comment extraire le pays de la dépendance structurelle de la vente des hydrocarbures pour créer des richesses pérennes et soutenir des salaires plus forts ». La politique économique mise en œuvre en quinze ans par l’utilisation des ressources issues de la hausse importante des prix des hydrocarbures pour sortir d’une telle situation est loin d’y aller. Ces cadres de l’UGTA savent par différentes sources, et particulièrement par les partenaires commerciaux de l’Algérie, que les mauvaises prévisions sur les capacités d’exportation d’hydrocarbures et l’explosion de la demande intérieure en gaz ne permettent pas d’envisager une souplesse des pouvoirs publics en matières salariale. Les syndicalistes admettent que l’économie ne peut plus soutenir une dépense publique importante et des transferts sociaux colossaux mis en œuvre pour maintenir, la paix sociale. Mais « ce n’est pas aux travailleurs de payer le manque d’anticipation de l’exécutif » soulignent-ils. Mais l’UGTA a-t-elle encore du ressort pour faire face à une période « difficile » ? Les syndicalistes interrogés ne semblent pas en mesure d’y répondre par l’affirmative, la direction du syndicat unique ayant privilégié le terrain politique au détriment de l’écoute et de la prise en charge des revendications des collectifs de base.

ARTICLES SIMILAIRES

Á la une Actualités

U20 : le Maroc offre au Maghreb un 1er titre de champion du monde en football

Le Maroc a remporté la Coupe du monde des U20 cette nuit à Santiago du Chili en battant l’Argentine deux buts à zéro en finale de la compétition. Les Marocains… Lire Plus

Actualités Maghreb

Ghaza après le 7 octobre : 6 regards croisés sur deux ans de génocide et leurs conséquences

Depuis l’attaque du 7 octobre 2023 et la riposte génocidaire d’Israël, la question palestinienne a retrouvé une centralité qu’elle n’avait plus connue depuis les années 2000. Le conflit de Ghaza… Lire Plus

Actualités Maghreb

Cartes de séjour en Europe : l’Algérie et la Tunisie en recul, le Maroc dans le top 3

L’Office européen des statistiques (Eurostat) a publié son dernier rapport sur la délivrance des premiers titres de séjour en 2024. Les données, très attendues, placent l’Algérie à la 22ᵉ place… Lire Plus

Actualités Économie

Entretien : « L’Algérie et la Tunisie doivent se positionner en locomotive de l’industrie automobile africaine » (Vidéo)

L’industrie automobile tunisienne, au cœur des enjeux industriels du Maghreb, s’impose désormais comme un pôle régional dynamique, porté par le développement soutenu de la sous-traitance. Dans une interview accordée à… Lire Plus

Actualités Maghreb

Flottille Samoud maghrébine : le départ vers Gaza reporté au 7 septembre

Le comité d’organisation de l’initiative « Flottille du Samoud maghrébin pour briser le blocus de Gaza » a annoncé, ce mercredi 3 septembre, le report du départ initialement prévu le… Lire Plus