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Algérie : une redéfinition progressive de ses partenariats commerciaux extérieurs

Par Lyas Amara
23 juin 2025

Alors que l’économie algérienne poursuit sa mue pour sortir de la dépendance aux hydrocarbures, son commerce extérieur se transforme en profondeur. Les flux traditionnels avec l’Europe laissent place à une configuration plus éclatée, marquée par l’émergence de nouveaux partenaires asiatiques, africains, moyen-orientaux et même américains. L’Algérie s’inscrit de plus en plus dans une logique de diplomatie économique multilatérale.

Un excédent commercial fortement compressé en 2024

Selon l’Office national des statistiques (ONS), les exportations algériennes ont chuté de 11,6 % en 2024, passant à 6 605,8 milliards de DA, tandis que les importations ont progressé de 9,6 % pour atteindre 6 352,1 milliards de DA. Résultat : l’excédent commercial s’est réduit à 253,7 milliards de DA, contre 1 674,5 milliards en 2023, soit une baisse de près de 85 %.

Le taux de couverture s’est affaibli à 104 %, dans un contexte marqué par une baisse de 7,4 % des prix mondiaux des hydrocarbures, principale source de devises du pays.

Les partenaires traditionnels en mutation

L’Europe reste un partenaire majeur, représentant environ 48 % des échanges commerciaux algériens. La Chine conserve sa place de premier fournisseur avec 22,9 % de parts de marché, suivie de la France (11,7 %) et de l’Italie (7,4 %). En matière d’exportations, l’Italie, la France et l’Espagne restent les principaux clients.

Mais la hiérarchie évolue : la Chine étend son influence au-delà du commerce, avec des projets d’investissement dans les infrastructures, les mines et le transport.

Un pivot stratégique vers l’Afrique, l’Asie et le Golfe

L’Algérie développe des partenariats dynamiques en Afrique, avec la Mauritanie, le Mali, le Niger et le Sénégal. Les échanges avec le continent ont atteint 5,3 milliards $ sur les 11 premiers mois de 2023, renforcés par les projets logistiques au sud du pays et l’adhésion à la ZLECAf. Dans le monde arabe, le virage vers le Golfe est net: le Qatar investit dans la finance, la pétrochimie et les télécoms, Oman explore les coopérations minières et chimiques, tandis que la Turquie, avec plus de 6,3 milliards $ d’échanges en 2023, renforce sa position via l’industrie, la sidérurgie et le textile.

Les États-Unis et l’Amérique latine : vers une nouvelle dynamique

L’Algérie et les États-Unis entretiennent un partenariat commercial structuré, même si déséquilibré. En 2023, le volume des échanges bilatéraux était estimé à environ 2,5 milliards $, dominé par les hydrocarbures algériens exportés et les équipements importés. Washington demeure un acteur majeur en matière de technologies pétrolières, d’agroalimentaire et d’investissement pharmaceutique. Un dialogue économique stratégique bilatéral a été relancé récemment, axé sur les énergies renouvelables et la digitalisation.

Du côté de l’Amérique latine, l’Algérie cherche à tisser des liens plus étroits. Le Brésil est désormais l’un des premiers fournisseurs agricoles de l’Algérie (viandes, sucre, céréales), avec des échanges dépassant 1,5 milliard $. Des opportunités émergent aussi avec l’Argentine, le Mexique et la Bolivie, notamment autour de la coopération énergétique et des engrais.

Diversification timide, mais amorcée

En dépit d’une dépendance toujours forte aux hydrocarbures (plus de 90 % des recettes d’exportation), l’Algérie enregistre des progrès sur le plan de la diversification. Les exportations hors hydrocarbures ont atteint 7 milliards $ en 2023, contre 1,7 milliard $ en 2019. Ces performances sont tirées par l’agroalimentaire, les matériaux de construction, les engrais, le fer, les produits pharmaceutiques et les dérivés du phosphate.

Vers un nouveau positionnement géoéconomique

L’Algérie dessine une carte commerciale plus fluide et diversifiée. Elle s’appuie toujours sur l’Europe, mais explore avec détermination les axes Sud–Sud, les opportunités asiatiques et les partenariats transatlantiques.

Face à la baisse des recettes d’exportation en 2024, cette stratégie semble vitale pour préparer l’économie à l’après-pétrole. Le renforcement des échanges avec les États-Unis, la Turquie, le Qatar, la Chine, le Brésil ou encore l’Afrique constitue un tournant stratégique. Mais pour être pérenne, cette réorientation devra s’accompagner de réformes industrielles, d’une montée en qualité des produits locaux et d’un climat d’affaires attractif.

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