La récente revalorisation des salaires des enseignants en Algérie, touchant les trois cycles d’enseignement (primaire, moyen et secondaire), représente une avancée sociale, mais soulève également d’importantes questions budgétaires. Si cette mesure vise à améliorer les conditions de vie des enseignants, elle engendre aussi des défis financiers pour l’État.
Les nouvelles grilles salariales, qui entreront en vigueur en avril 2025, prévoient des augmentations mensuelles nettes allant de 7 616 Da à 18 315 Da pour les enseignants du primaire, de 8 489 Da à 17 280 Da pour ceux du moyen, et de 8 756 Da à 18 089 Da pour ceux du secondaire. Cette revalorisation s’inscrit dans le cadre d’un nouveau statut particulier et d’un régime indemnitaire adopté par le gouvernement.
Toutefois, plusieurs syndicats du secteur, dont le Conseil national autonome du personnel enseignant du secondaire et technique (Cnapeste), le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest) et le Conseil des enseignants des lycées algériens (CELA), estiment que cette réforme est insuffisante et constitue même un recul par rapport aux acquis obtenus en 2012. Leur mécontentement a donné lieu à un mouvement de grève cyclique entamé le 11 février 2025, avec des rassemblements devant les directions de l’éducation à travers le pays.
Le secteur de l’éducation nationale est l’un des plus gros employeurs en Algérie, avec des centaines de milliers d’enseignants et de personnels administratifs. Par conséquent, l’augmentation des salaires entraîne une hausse considérable de la masse salariale, qui représente déjà une part dominante du budget de l’éducation.
Le budget alloué au secteur pour l’exercice 2025 est de 1 645 milliards de dinars algériens, soit environ 12 milliards de dollars. Cette enveloppe budgétaire place l’Éducation nationale parmi les cinq ministères bénéficiant des plus importantes allocations financières de l’État, aux côtés des Finances, de la Défense, de l’Intérieur et de la Santé.
L’une des principales conséquences de cette augmentation des salaires est la réduction des marges budgétaires allouées aux investissements dans l’infrastructure scolaire, qui est un enjeu crucial, notamment face à la croissance démographique. La construction et la rénovation des établissements, l’acquisition d’équipements pédagogiques et la formation continue des enseignants pourraient être reléguées au second plan. Cette situation risque d’impacter à terme la qualité des conditions d’apprentissage des élèves.
L’augmentation des salaires des enseignants en Algérie était devenue indispensable pour garantir leur bien-être et assurer une certaine stabilité sociale. Cependant, elle pose un défi de taille pour l’État, qui doit jongler entre réponse aux attentes des enseignants et maintien d’un budget viable pour l’éducation nationale. Si cette réforme marque une avancée, elle souligne également l’urgence de repenser le financement du secteur éducatif pour garantir une éducation de qualité sans compromettre l’équilibre budgétaire du pays.