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Bouteflika 5 : trois scénarios tranquilles pour perdre

Par Ihsane El Kadi
1 mars 2019
Que va t’il se passer après cette journée de mobilisation, sans doute la plus forte de l’histoire de l’Algérie ? Le pouvoir va perdre.

Le président Bouteflika ne va pas renoncer à déposer ou faire déposer sa candidature pour un 5e mandat présidentiel ce dimanche 3 mars. De là ou il se trouvait encore ce vendredi à la mi-journée, sur un lit d’hôpital à Genève, il ne peut pas percevoir les clameurs d’un pays qu’il n’a jamais soupçonné. Quand bien même il en verrait un bout, il ne peut pas penser qu’il est, au moins par sa mégalomanie, directement responsable de ce raz de marée civique. Et qu’il est déchu devant l’éternité. Lui considère toujours que la présidence à vie est un retour légitime que lui doit l’Algérie parce qu’il pense l’avoir sortie du tunnel des années 90. Ses soutiens à Alger qui, comme Abdelmalek Sellal et Ali Haddad, ont la tête près de la bouche du canon, n’ont pas encore réfléchi à autre chose qu’au 5e mandat. Et puis ce n’est pas eux qui décideront de ce qu’il faudra faire après cette journée qui a mis dans les rues du pays sans doute plus d’un million de personnes dont plus de 200 000 dans la seule capitale. Les rumeurs qui évoquent une négociation à Genève autour de son lit d’hôpital avec Bouteflika sur l’après Bouteflika et qui citent des noms d’éventuels successeurs nous enfument. La partie se déroulera à Alger. Comme de coutume. Au ministère de la défense. L’Etat Major devra vite faire cette fois la balance de ce que va couter la poursuite du coup de force institutionnel aujourd’hui rejeté par un peuple entier. Et de ce que va lui « rapporter » de le poursuivre.

Un relais de contrainte

Bouteflika ne renoncera pas au 5e mandat sans un relais de contrainte qui passera de la rue à son entourage. Et qui sera incarné forcément par son acolyte de ses dernières années, le général de corps d’arme Ahmed Gaïd Salah.  Ce qui va se passer donc, c’est une réunion de la haute hiérarchie de l’ANP qui devra arbitrer entre trois scénarios possibles. Le premier est exclu à chaud. Bloquer la candidature de Bouteflika signifierait donner la victoire aux urnes à un des candidats de l’opposition, Ali Benflis ou Ali Ghediri étant sans doute les mieux placés. Le second scénario serait de laisser Abdelaziz Bouteflika déposer sa candidature et de prendre le temps de réfléchir à une sortie de crise en misant sur l’essoufflement du mouvement populaire, pour en négocier les termes dans la position la moins faible possible. Scénario risqué, mais réaliste. Le troisième scénario est une variante du deuxième. L’ANP peut s’appuyer sur les incidents qui ont émaillé la fin de la journée de mobilisation du 1er mars, notamment à Alger, pour décider que l’ordre public et la sécurité nationale sont menacés. Et considérer qu’une campagne électorale normale ne peut plus être assurée, encore moins un scrutin apaisé.  L’agenda du report de  l’élection serait ouvert. Il peut survenir avant le dépôt de candidature de Bouteflika, mais comme il n’y a que lui qui peut le décréter, le plus probable est qu’il se réalise après. Bouteflika pourrait donner le coup d’envoi institutionnel à la transition démocratique qui frappe à la porte de l’Algérie du son de centaines de milliers de marcheurs. En reportant les élections et en finissant par ne pas se reconduire  candidat dans le nouveau processus électoral. Il lui faudra entre Genève et Alger encore quelques escarmouches et autres coulées de lave populaire pour s’y résoudre. Il le fera. Sous la contrainte. Une affaire d’un vendredi de plus ? De deux ? Les Algériens ont goutté à la saveur de la liberté. Celle de scander sa vie sous le ciel bleu d’un pays magnifique. Rien ne les arrêtera plus.

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