L’Algérie a réduit de 99 % le trafic de carburant à ses frontières. Les pertes sont passées de 1,5 milliard de litres en 2013 à 3-5 millions en 2025, une économie bienvenue dans un contexte de déficit budgétaire.
Les autorités algériennes ont réussi à réduire drastiquement le trafic de carburant aux frontières ouest (Maroc, Mauritanie) et sud (Mali, Niger) depuis les pics observés en 2013, passant de pertes estimées à environ 1,5 milliard de litres annuels à des saisies résiduelles se situant entre 3 et 5 millions de litres en 2025. Ce recul constitue une aubaine pour l’économie algérienne, paralysée ces dernières années par un déficit budgétaire important, notamment aggravé par la chute des recettes énergétiques.
Des tranchées de cinq mètres pour stopper le flux
Dès 2013, l’Algérie a décrété l’état d’alerte à cause d’un trafic quotidien qui pouvait atteindre 300 000 tonnes vers le Maroc. Pour y remédier, des tranchées d’une profondeur de cinq mètres ont été creusées, opération achevée en 2016. Les saisies de carburant ont atteint un pic à 660 000 litres en 2014 aux frontières ouest, avec une hausse des interceptions estimée à 60%.
En 2025, selon des témoignages recueillis par Maghreb Emergent dans la région de Tlemcen, le trafic de carburant est désormais perçu comme appartenant au passé. « Le trafic de carburant a disparu, aujourd’hui c’est le trafic de drogue qui constitue un défis », déclare un pompiste de Sebdou. Cet acteur ancien du secteur, qui gère une station-service depuis plusieurs décennies, préfère « les pertes de quelques sous sur le trafic de carburant plutôt que de perdre nos enfants, livrés au trafic et à la consommation de toutes sortes de drogues ».
Au sud, la production locale change la donne
Un scénario similaire prévaut à la frontière sud avec le Mali. Depuis la rupture quasi totale entre la junte au pouvoir à Bamako et Alger, quasiment plus aucune goutte de carburant ne traverse cette frontière.
Quant à la frontière avec le Niger, le carburant n’est plus un enjeu majeur de contrebande, car le Niger est devenu producteur de pétrole depuis plusieurs années. Certaines régions frontalières continuent de consommer du gasoil et de l’essence algériens, nous confient des sources locales. Toutefois, le carburant algérien y est de plus en plus concurrencé par les carburants locaux.
Dans d’autres régions du Niger, c’est le carburant en provenance du Nigeria, moins cher et plus disponible, qui est majoritairement consommé, en raison d’une sécurisation moins stricte de la frontière nigéro-nigériane.
La Tunisie, dernier débouché du trafic
La Tunisie reste pratiquement la seule destination significative des contrebandiers de carburant. Cependant, l’approvisionnement ne s’opère pas forcément via les stations des villes frontalières.
Les mesures de sécurité ne se limitent pas aux frontières sud et ouest ; les autorités algériennes traquent les narcotrafiquants et contrebandiers sur tout le territoire. Selon plusieurs témoignages, ces trafiquants préfèrent désormais s’approvisionner depuis les wilayas de l’intérieur. « Khenchela est devenue une source d’approvisionnement des trafiquants de carburant », confie un témoin.
Le dernier communiqué du MDN rapporte d’ailleurs la saisie d’une grande quantité de carburant à Reggane, dans la wilaya d’Adrar, à des centaines de kilomètres de Bordj Badji Mokhtar, renforçant l’idée d’un déplacement géographique du trafic.