En pleine recomposition des alliances économiques méditerranéennes, Pékin s’impose désormais comme le partenaire de premier plan d’Alger. Cette montée en puissance, déjà amorcée depuis plusieurs années, s’accélère tandis que les relations historiques franco-algériennes traversent une zone de turbulences diplomatiques sans précédent depuis l’été dernier.
En effet, la situation commerciale de 2024 dessine une nouvelle carte des échanges. Avec 12,5 milliards de dollars de transactions, la Chine domine désormais largement le paysage commercial algérien. Elle capte près d’un quart des importations du pays (22,9%), reléguant Paris (11,7%) et Rome (7,4%) aux places d’honneur. Cette dynamique s’est encore renforcée en 2025 avec la signature de 8 nouveaux accords d’une valeur totale de 2 milliards de dollars.
Ce qui frappe, au-delà du volume, c’est l’étendue des secteurs concernés. Du rail à l’automobile, en passant par l’électroménager et l’agriculture, la coopération entre les deux pays couvre aujourd’hui tous les domaines stratégiques. Le voyage officiel du président Tebboune à Pékin l’an dernier a marqué un tournant, avec la promesse d’investissements massifs chiffrés à 36 milliards de dollars.
Des tensions avec Paris qui rebattent les cartes
La brouille diplomatique survenue l’été dernier entre Alger et Paris, notamment autour du dossier saharien, a clairement accéléré cette réorientation. Bien que la France reste un acteur majeur des échanges avec environ 12,7 milliards de dollars en 2024, sa position s’effrite progressivement.
Des blocages administratifs touchant certains secteurs clés comme le blé ou les composants industriels ont fragilisé les positions françaises. Les milliers d’entreprises tricolores présentes sur le sol national craignent désormais une marginalisation face à la concurrence asiatique particulièrement agressive.
Le modèle économique chinois : Une réponse aux attentes de l’Algérie ?
La recette du succès chinois tient largement à son approche globale. Au-delà du simple commerce, Pékin mise sur des investissements directs associés à des transferts de compétences réels.
Cette approche s’inscrit dans un modèle qui a fait ses preuves. Depuis des décennies, la Chine investit massivement dans ses infrastructures. Entre 2000 et 2014, plus de 500 000 projets ont vu le jour sur son territoire, avec une croissance impressionnante dans les régions les moins développées. Résultat? Des inégalités réduites et un essor industriel remarquable.
Aujourd’hui, la Chine exporte cette formule gagnante. Grâce aux financements de ses grandes banques, elle permet à des pays comme l’Algérie d’accéder à des infrastructures qu’ils n’auraient pas pu se payer seuls.
L’Algérie en récolte déjà les fruits. L’usine automobile de Batna en partenariat avec Jetour, les équipements ferroviaires produits conjointement par la SNTF et Genertec CNTIC, ou encore les climatiseurs fabriqués localement grâce à l’alliance Condor-Hisense montrent l’efficacité de cette approche. Plus qu’une simple délocalisation, ces projets s’accompagnent d’un véritable transfert de compétences et forment la main-d’œuvre locale.
Cette stratégie tombe à point nommé pour Alger qui cherche à sortir de sa dépendance aux hydrocarbures. Les autorités y voient un moyen concret de créer des emplois et de bâtir un tissu industriel local solide. Un contraste frappant avec certains partenariats occidentaux, souvent accusés d’entretenir des relations économiques déséquilibrées.