Plus de 130 millions de dollars de recettes annuelles, une vision d’investissement audacieuse, et la transformation de 18 produits de rebut en ressources stratégiques, le groupe HOLCIM, à travers son unité Geocycle, se positionne comme un acteur clé de l’économie circulaire algérienne, faisant du déchet une nouvelle richesse pour l’exportation.
L’engagement d’HOLCIM dépasse la simple gestion de ses propres rejets. L’unité Geocycle, qui relève du groupe, incarne un projet profondément innovant dans l’industrie circulaire. Ce modèle d’affaires, basé sur le « zéro déchet », vise non seulement à maîtriser l’impact environnemental de ses activités, mais surtout à minimiser les effets néfastes des autres industries en réutilisant une liste croissante de produits considérés jusqu’alors comme de simples déchets.
L’importance de cette unité est confirmée par ses réalisations, elle a récemment signé des conventions majeures, notamment avec le Groupe BERRAHEL. De plus, elle dispose d’un laboratoire interne dont la performance a été classée première l’année dernière sur l’ensemble des usines du groupe. Ce laboratoire est le cœur de l’innovation, démontrant que les rebuts jetés dans la nature pourraient devenir une source de richesse pour l’économie nationale, non seulement pour le marché local mais aussi pour les marchés internationaux.
L’impératif de l’économie circulaire et la richesse cachée
Karima Fareha, directrice de l’activité industrielle Geocycle, met en perspective l’urgence de cette démarche en s’appuyant sur des chiffres alarmants à l’échelle mondiale et nationale. La problématique du déchet est avant tout une urgence climatique.
Elle déclare :« il faut savoir qu’il y a plus de 60 km2 de décharges chaque année dans le monde, qui provoquent 3 à 4 pour cent des gaz à effet de serre. En Algérie, on réussit à utiliser uniquement 8 à 10 % des déchets. Recycler, réduire et valoriser sont des étapes très importantes pour l’économie circulaire en Algérie. »
Face à ce constat, l’approche de Geocycle est systémique. Le laboratoire a déjà réussi à introduire 18 matériaux qui étaient auparavant jetés dans la nature, mais qui peuvent maintenant être exploités dans la cimenterie. Cette initiative montre la voie pour transformer la logistique du déchet en une source de valeur ajoutée et d’exportation. Le cas des déchets de l’usine sidérurgique Tosyali est un exemple frappant : autrefois mis au rebut, ils sont actuellement réutilisés par le groupe HOLCIM, suite à une convention entre les deux parties.
Mme Fareha détaille les gisements inexploités et les opportunités d’investissement : « Des centaines de millions de tonnes d’hydrocarbures sont perdues. À Alger, on recense près de 90 000 mètres cubes de résidus d’eaux usées à Baraki, utilisables dans la cimenterie, et qui seront exploités dans l’usine de M’Sila. Notre capacité actuelle de régénération des déchets s’élève à 30 000 tonnes par an, une capacité que nous souhaitons fortement renforcer à l’avenir. Nous envisageons également d’investir dans la valorisation des résidus d’hydrocarbures, étant donné que nous sommes un pays pétrolier. Même les huiles usagées sont recyclables et peuvent jouer un rôle important dans la production de ciment. »
Un Gisement Stratégique : La Vase des Barrages
Au-delà des déchets industriels, l’entreprise s’attaque à des enjeux nationaux majeurs comme la préservation des ressources hydriques. L’intégration de la vase des barrages dans le processus de production est une double réussite écologique et industrielle.
Mme Fareha souligne l’importance de ce projet : « Il y a aussi la vase des barrages, qui est très importante. Elle remplace parfaitement l’argile, et c’est très bénéfique pour renforcer les réserves d’eau dans les 81 barrages en Algérie. On a déjà fait des essais, suite à un partenariat avec l’Université d’Aïn Témouchent et la Direction Hydraulique de la wilaya. Nous avons réussi à utiliser 300 000 tonnes de vases des barrages, et pour le produit, c’était performant, le rendement était le même. »
Cette réussite, qui représente 300 000 tonnes de vase valorisée, confirme l’efficacité du modèle d’innovation collaborative. L’usine HOLCIM d’Oggaz, consciente de ce rôle, maintient d’ailleurs des partenariats actifs avec les universités des cinq wilayas limitrophes, plusieurs écoles, et les centres de formation professionnelle. Mohamed Benarmas, directeur de l’unité HOLCIM, a affirmé que l’investissement dans le capital humain, la formation des fonctionnaires et le renforcement de la sécurité interne restent des objectifs primordiaux pour garantir la pérennité de cette performance à l’avenir.
L’Algérie, puissance d’exportation : le rôle clé de HOLCIM
La valorisation des déchets et l’excellence industrielle interne sont le socle de la réussite du groupe sur les marchés extérieurs. L’usine HOLCIM à Oggaz est un moteur de l’exportation algérienne, transformant le pays, autrefois importateur, en acteur majeur de l’exportation de ciment.
Salim Mokdad, Directeur Exportation, insiste sur cette mutation historique : « L’histoire de l’exportation pour notre entreprise est passionnante. Il ne faut pas oublier qu’il y a quelques années, l’Algérie était importatrice de ciment. C’est depuis 2017 que l’Algérie a exporté pour la première fois du ciment vers l’étranger, et cela est parti de l’usine HOLCIM d’Oggaz. Aujourd’hui, l’Algérie exporte pour 400 millions de dollars de ciment, et le groupe HOLCIM détient une part de 130 millions de dollars, soit environ 38 % des exportations. »
Les chiffres sont éloquents : avec 38 % de la valeur nationale d’exportation de ciment, HOLCIM est un pilier de la diversification économique. Présent sur sept des neuf ports algériens, le groupe fait face aux défis de la concurrence asiatique sur le marché africain et aux exigences européennes.
Salim Mokdad développe la stratégie et les investissements de son groupe en affirmant : « Maintenant, nous devons être à la hauteur de la concurrence, notamment celle des Asiatiques qui étouffent le marché africain. L’investissement dans la logistique devient une nécessité pour pouvoir affréter des bateaux de 90 jusqu’à 100 000 tonnes, et le marché européen se serre de plus en plus, suite aux exigences carbone, et cela va être de plus en plus dur. Malgré cela, nous exportons plus de 400 000 tonnes par an vers les USA et l’Europe, et le ciment blanc est un produit qui est très demandé. Nous avons investi dans la logistique, préparé les quotas avant l’arrivée des bateaux. Il y a une forme de simplification de la part des autorités pour l’exportation. La planification de la réception du projet est très importante pour l’exportation. Ce qui assure notre exportation, c’est la qualité, notamment du ciment blanc, puisque les importateurs sont exigeants par rapport au produit. »
En assurant l’exportation de plus de 400 000 tonnes par an vers des marchés exigeants comme les États-Unis et l’Europe, l’entreprise mise sur la qualité supérieure, notamment du ciment blanc. Leurs productions couvrent aujourd’hui le Ciment blanc, le Ciment gris, et les deux types de clinkers, destinés au marché local ou à l’importation. Enfin, l’avenir passe par l’écologie : le groupe a investi dans le Ciment vert, « ami de la nature », qui, pour ce début, est disponible uniquement sur le marché national, posant les bases d’une future exportation durable. L’histoire d’HOLCIM Geocycle est celle d’une transformation où le déchet, une fois valorisé, devient une matière première essentielle à la souveraineté économique et à la puissance exportatrice de l’Algérie.