Par Samy Injar
La dernière enquête sur l’emploi publiée – puis dépubliée – par l’Office national des statistiques (ONS) sur son site, a situé le taux d’emploi des femmes en Algérie en octobre 2024 à 22%, avec à la clé le passage symbolique des 3 millions de femmes occupées.
Ce taux, pour faible qu’il demeure, ne rend pas justice à une lente, mais constante évolution de l’emploi féminin dans le pays, qui lui permet de rattraper celui de ses voisins marocain et bientôt tunisien. Ce taux était, il y a vingt ans, inférieur à 15% de la population féminine en âge de travailler. Il dit aujourd’hui encore que plus de 3 femmes sur 4 en âge de travailler ne le font pas ou ne le font pas dans un cadre formel, objet de l’enquête de l’ONS.
Une partie importante d’entre elles sont demandeuses d’emploi, ce qui explique la disparité entre le taux de chômage masculin (9%) et féminin (25%) selon la même enquête. La progression du taux d’emploi féminin a connu une vitesse modérée durant la période 2012 -2019.
Elle a bien résisté au choc récessif du Covid en 2012-22, épisode qui a fortement impacté l’emploi féminin au Maroc avec le reflux du tourisme et de l’artisanat. L’accélération du rattrapage semble se situer entre 2022 et 2024 dans la dernière partie de la période, les enquêtes ONS sur l’emploi ayant disparu depuis 2019. Cette accélération dans la remontée de l’emploi des femmes serait due à une tendance générale de montée du taux d’activité et à des politiques publiques ciblées en soutien de l’emploi féminin.
L’Algérie en mode rattrapage
L’Algérie serait, selon la dernière enquête de l’ONS, passée au second rang, devant le Maroc et derrière la Tunisie, en matière d’emploi féminin parmi les trois pays du Maghreb central. Ce dépassement est autant dû aux progrès – lents sur la durée – de l’emploi des femmes en Algérie qu’à son recul spectaculaire en Maroc, selon le recensement général de la population et de l’habitat ( RGPH) publié par Haut commissariat au plan HCP. Il était de 21,3% en 2014 pour tomber à 16,2% à fin 2024, moment où il est dépassé par les 22% affichés par l’ONS.
L’emploi féminin, passé en tête au Maghreb en 2012- 2013 à 26% de la population féminine en âge de travailler, connait un léger recul depuis 2018 et tombe désormais sous la menace du rattrapage algérien si la courbe poursuivait son redressement de 2022 – 2024, comme le graphique ci-dessous :
(Algérie courbe foncée, Maroc bleu, Tunisie rouge).

La présence des femmes dans le monde du travail demeure faible au Maghreb. 68% des femmes en âge de travailler sont occupées en moyenne au sein des pays de l’Union européenne. Et même s’il existe un réservoir important de travail informel des femmes qui échappe aux enquêtes statistiques dans les pays du Maghreb, le gap demeure important avec les pays avancés.