M A G H R E B

E M E R G E N T

Á la une

Finance islamique en Algérie : un marché qui peine à concurrencer l’épargne traditionnelle

Par Yasser K 24 septembre 2025

En croissance depuis quatre ans, la finance islamique affiche des volumes en nette progression. Pourtant, elle reste encore très loin derrière l’épargne traditionnelle, qui continue de concentrer l’essentiel des dépôts des Algériens.

Depuis son lancement à grande échelle en 2020, la finance islamique a mobilisé plus de 900 milliards de dinars, dont 506 milliards en dépôts et 437 milliards en financements. Douze établissements, dont deux exclusivement islamiques, proposent désormais ces produits. Le secteur comptait 745 000 comptes ouverts à la fin septembre 2024.

Cette progression reste néanmoins modeste si on la compare à l’épargne classique. Les seuls comptes d’Algérie Poste rassemblent 1348 milliards de dinars. En ajoutant les dépôts aux CCP et au Trésor, le total atteint 2 126 milliards. Quant au système bancaire traditionnel, il comptabilise 13,7 millions de comptes en dinars, soit près de dix-huit fois plus que l’ensemble de la finance islamique.

Des rendements sans véritable avantage

Dans les banques classiques, les taux de rémunération oscillent entre 2,5 % et 4,5 %, selon les montants déposés. La Banque nationale d’Algérie applique 2,5 % pour l’épargne standard et jusqu’à 4,5 % pour les dépôts dépassant 200 millions de dinars. La Banque de développement local propose une grille allant de 2,5 % à 3,8 %.

Les produits islamiques, censés se distinguer par un mécanisme de partage des profits, offrent en réalité des rendements très proches de ceux des banques conventionnelles. Cette quasi-équivalence réduit leur attractivité, notamment quand les taux effectifs des crédits classiques varient de 5,7 % pour le long terme à plus de 10 % pour la consommation.

Un impact économique limité

La structure des financements islamiques montre une forte concentration : environ 70 % sont dirigés vers l’immobilier et le commerce, contre seulement 20 % pour des activités productives. L’effet attendu en matière d’inclusion financière reste également faible. Selon les données disponibles, quatre nouveaux clients sur cinq étaient déjà bancarisés avant d’ouvrir un compte islamique.

L’épargne classique, bien qu’imposante, souffre de ses propres limites. Malgré l’ampleur des dépôts, leur utilisation reste faible. Seuls 44 % des adultes possèdent un compte bancaire en Algérie, contre 70 % en Tunisie et 60 % au Maroc. Une partie importante de l’épargne nationale demeure donc immobilisée dans les CCP ou circule en dehors du système bancaire, sans être réinvestie dans l’économie.

Une dynamique mondiale mais marginale

À l’échelle internationale, la finance islamique enregistre une croissance annuelle estimée à 15 % et pourrait atteindre 4 940 milliards de dollars d’actifs en 2025. Mais son poids reste très limité comparé aux 360 000 milliards d’actifs financiers du système conventionnel.

En Algérie, l’essor de la finance islamique traduit surtout l’effort des banques pour diversifier leur offre et répondre à la demande d’une partie de la clientèle. Mais son rôle économique demeure restreint. Quant à l’épargne classique, elle reste massive mais insuffisamment orientée vers l’investissement.

ARTICLES SIMILAIRES

Actualités Finances

Un boom chiffré qui patine : la Bourse d’Alger referme 2025 en demi-teinte

La Bourse d’Alger avait tout misé sur 2025 pour s’imposer. Avec l’introduction de la BDL en mars et une série d’opérations très visibles, la place algéroise promettait une année de… Lire Plus

Actualités Algérie

Assises des commissaires aux comptes : un front professionnel pour sortir durablement de la liste grise du GAFI

La 10ᵉ édition des Assises nationales des commissaires aux comptes, tenue les 22 et 23 décembre 2025 à Alger, a marqué un changement de dimension. Loin d’un simple forum corporatiste,… Lire Plus

Á la une Actualités

Régulation des marchés : le Conseil de la concurrence cible le numérique et les plateformes à forte rentabilité

Le Conseil de la concurrence a engagé une série d’enquêtes structurelles touchant des secteurs à forte valeur ajoutée, notamment la numérisation, le commerce électronique, le médicament et les applications de… Lire Plus

Á la une Actualités

CAN 2025 : à Rabat, les supporters algériens ont surmonté tous les obstacles

La pression a fini par payer. Mercredi, à Rabat, la plateforme officielle de la CAF a rouvert la vente des billets pour le match Algérie–Soudan, ainsi que pour les rencontres… Lire Plus

Actualités Économie

Algérie : un milliard de tonnes de limon piégées par le vide juridique

Faute de textes clairs, les sédiments accumulés dans les barrages algériens échappent à toute valorisation industrielle. Un gâchis économique et environnemental qui se chiffre en milliards de dinars. L’Algérie croule… Lire Plus