M A G H R E B

E M E R G E N T

Actualités

Financement de la presse en Algérie : un puissant levier de contrôle pour les autorités

Par Maghreb Émergent
3 mai 2023

Adoptée récemment par les deux chambres parlementaires, la nouvelle loi sur l’information renforce l’encadrement du travail des journalistes en Algérie, avec de nouvelles restrictions et sanctions en cas d’infractions.

Parmi les principales dispositions de cette nouvelle loi, une interdiction aux médias algériens de bénéficier de tout « financement » ou « aide matérielle directe et indirecte de toute partie étrangère » sous peine de « sanctions pénales prévues par la loi ».

La question du financement des médias a toujours constitué le meilleur levier pour les pouvoirs publics pour contrôler les médias et, le cas échéant, étouffer tous ceux dont on aura jugé qu’ils ont dépassé les limites fixées pour la presse en Algérie. Le financement publicitaire à travers l’Agence nationale d’édition et de publicité (ANEP), qui gère l’essentiel des budgets publicitaires de l’État est, dans cet esprit, l’un des principaux outils qui se révèlent comme obstacles à la liberté de la presse en Algérie.

Les médias indépendants ont souvent du mal à obtenir des contrats publicitaires de l’ANEP, ce qui les rend dépendants de financements privés ou des abonnements, sources de financement des plus précaires. Les médias qui se hasardent à critiquer le gouvernement ou la gestion des entreprises publiques sont souvent exclus de la publicité de l’Etat. L’ANEP a le pouvoir de réduire ou de supprimer les budgets publicitaires à tout média qui ne montre pas patte blanche ou remet en question la politique gouvernementale.

L’argument du financement étranger

En 2020, l’ancien ministre de la Communication, Ammar Belhimer, avait suscité une vive controverse en déclarant que plusieurs médias algériens recevaient des financements de l’étranger pour servir des intérêts étrangers plutôt que nationaux. Il avait également accusé certains médias d’être des « mercenaires de la plume », agissant comme des agents étrangers pour influencer la politique algérienne.

Radio M et Maghreb Emergent, rares médias critiques sur la scène médiatique nationale, ont fait les frais de ces accusations. Ils ont ainsi fini par être censurés et leur directeur de publication, Ihasane El Kadi, emprisonné fin décembre dernier.

La déclaration de l’ancien ministre avait été largement interprétée comme une attaque contre les médias indépendants et avait été critiquée par plusieurs organisations de défense de la liberté de la presse, lesquelles ont dénoncé une tentative de restreindre la liberté éditoriale en Algérie.

Les médias indépendants ont rejeté les accusations de Belhimer, assurant qu’ils dépendaient principalement de sources de financement nationales, telles que les abonnements et les ventes de publicités, et qu’ils agissaient dans l’intérêt du public national et non pour le compte de forces étrangères.

Mais l’accusation du financement étranger est souvent brandie par le pouvoir en place pour stigmatiser toute solidarité des organismes étrangers avec les promoteurs de la liberté de la presse en Algérie. Une manière d’accréditer la fameuse thèse de « la main étrangère », qui a toujours eu son effet sur l’opinion public national.

Bien que la presse privée ait été autorisée à émerger en Algérie depuis la fin des années 1980, son accomplissement s’est heurté à un cadre juridique contraignant et au monopole de l’ANEP sur la publicité dont la loi est mise sous le boisseau depuis le début des années 2000. Sans la levée du monopole et avec les nouvelles dispositions, l’asphyxie financière guette de nombreux médias.

ARTICLES SIMILAIRES

Actualités Algérie

Accident Oued El Harrach : 18 millions de dinars à la charge du Trésor public, les assureurs aux abonnés absents

La compassion a un prix : 18 millions de dinars prélevés sur les finances publiques pour indemniser les victimes. Les assureurs, eux, échappent à la facture. Le réflexe est devenu… Lire Plus

Actualités Algérie

Ministère de l’Énergie : sept individus arrêtés pour escroquerie

Une affaire d’escroquerie impliquant de prétendues relations privilégiées au ministère des Mines a conduit à l’arrestation de sept suspects. Le juge d’instruction du tribunal de Bir Mourad Raïs, en banlieue… Lire Plus

Á la une Actualités

Oran : Des projets immobiliers sur conduites de gaz et centrales électriques, les habitants s’insurgent

Au cœur d’Oran, entre les quartiers de Es-Senia et Bir El Djir, se poursuit une longue bataille entre les habitants attachés à leur droit aux espaces verts et aux équipements… Lire Plus

Á la une Actualités

La Méditerranée reste ouverte aux rêves des migrants

En période estivale, la Méditerranée change de visage. La chaleur adoucit ses eaux, les nuits se réchauffent, et pour des centaines de migrants, cette saison devient une fenêtre d’opportunité. Les courants moins glacés, le brouillard complice et les nuits longues offrent unecouverture presque parfaite pour tenter la traversée. Le journal britannique The Guardian… Lire Plus

Á la une Actualités

Algérie : vers un accord majeur sur le gaz de schiste avec deux compagnies américaines

Le secteur du gaz de schiste en Algérie est sur le point de conclure un accord majeur avec ExxonMobil et Chevron, deux géants américains de l’énergie récemment reçus par le… Lire Plus