L’institution de contrôle financier a transmis neuf dossiers à la justice pour des faits susceptibles de qualification pénale. Elle réclame près de 783 millions de dinars à des responsables mis en débet, révélant l’ampleur des dysfonctionnements constatés.
Neuf rapports détaillés transmis aux procureurs généraux, trente décisions de mise en débet, plus de six millions de dinars d’amendes prononcées : le rapport annuel 2025 de la Cour des comptes, rendu public sur son site officiel, témoigne d’un renforcement significatif de la surveillance exercée sur les gestionnaires des fonds publics. Une montée en puissance qui intervient alors que les autorités affichent leur volonté de moraliser la vie administrative.
La juridiction financière a prononcé au total 1 125 décisions juridictionnelles au cours de l’exercice écoulé. Parmi celles-ci, trente ont engagé la responsabilité personnelle et pécuniaire de comptables publics, pour un montant cumulé de 782,6 millions de dinars. Des sanctions qui traduisent, selon l’institution, la nécessité de « garantir un recouvrement par tous les moyens légaux des sommes indûment perçues ou restant dues au Trésor public ».
Le phénomène des retards de dépôt des comptes demeure préoccupant. Pas moins de 1 060 décisions ont sanctionné des ordonnateurs et comptables publics pour défaut ou retard dans la transmission de leurs documents comptables au greffe. Une négligence récurrente qui entrave le travail de contrôle et que la Cour qualifie d’obstacle majeur à la transparence financière. Les amendes infligées à ce titre totalisent 6,08 millions de dinars.
Une capacité d’investigation en progression
L’activité de l’institution révèle des moyens de contrôle renforcés. Sur les 777 opérations inscrites au programme 2023, 764 ont été effectivement engagées, soit un taux de 98 %. Le taux d’exécution atteint 84 %, avec 652 missions menées à leur terme. Ce travail a débouché sur 734 rapports, dont 597 consacrés à la vérification des comptes et 137 à l’évaluation de la qualité de gestion -un volume que la Cour juge “significatif” au regard de ses moyens.
La chambre de discipline budgétaire et financière n’est pas demeurée inactive. Vingt décisions ont été rendues à l’encontre d’ordonnateurs ayant contrevenu aux règles d’utilisation des deniers publics. Si neuf d’entre eux ont bénéficié d’une relaxe, onze ont écopé de sanctions pécuniaires totalisant 815 000 dinars. Un bilan que l’institution qualifie de « reflet de la fermeté » adoptée face aux manquements constatés.
Santé, numérique, collectivités : des carences persistantes
Le rapport formule trente-huit recommandations aux pouvoirs publics, visant à « renforcer les mécanismes de contrôle interne » et à « instaurer une gestion saine et efficace des fonds et biens publics ». Treize notes d’insertion détaillent les principales observations relatives à la gestion des ressources par les entités contrôlées-autant de constats qui dessinent, en creux, les faiblesses persistantes de l’appareil administratif algérien.
Parmi les dossiers examinés figurent des sujets sensibles : la résilience du système sanitaire national face aux crises, le bilan jugé « en deçà des objectifs » du plan national de lutte contre le cancer 2015-2019, ou encore les difficultés rencontrées par l’Agence nationale de promotion des parcs technologiques dans la conduite de ses projets de numérisation.
Plusieurs communes ont également fait l’objet d’audits portant sur la gestion des ressources humaines, l’encadrement de l’expansion urbaine et l’accès des citoyens aux services publics de base -des domaines où les carences relevées appellent, selon la Cour, “des mesures correctives urgentes”.