La flambée mondiale du cuivre frappe de plein fouet les chantiers algériens. Câbliers, électromécaniciens et entreprises de construction voient leurs coûts exploser, menaçant les projets d’infrastructures et d’énergies renouvelables dans un pays qui importe la quasi-totalité de ce métal devenu stratégique.
Les cours du cuivre enchaînent les records, propulsés au‑delà de 11 700–11 800 dollars la tonne sur le LME (London Metal Exchange), soit une hausse de plus de 25% sur un an et d’environ 5% sur un mois. Cette envolée, selon les observateurs du marché, « redonne au métal rouge un rôle de baromètre avancé de l’activité industrielle mondiale ».
En effet, la dynamique actuelle s’appuie d’abord sur un environnement monétaire plus accommodant, après la baisse récente des taux de la Réserve fédérale américaine et l’amélioration des perspectives de croissance aux États‑Unis, qui ont stimulé l’appétit pour les métaux industriels. La faiblesse relative du dollar renforce en parallèle l’attrait du cuivre pour les investisseurs internationaux.
Côté demande réelle, les besoins liés aux véhicules électriques, aux réseaux électriques, aux énergies renouvelables et aux centres de données tirent structurellement la consommation, au point que plusieurs analystes anticipent un déficit de cuivre raffiné dans les prochaines années. La Chine, premier consommateur mondial, a de son côté réaffirmé une politique budgétaire « proactive » et un soutien à l’investissement, ce qui alimente les anticipations de demande pour 2025–2026.
Des contraintes d’offre et un volet spéculatif
Sur l’offre, le marché reste fragilisé par des interruptions de production, la baisse des teneurs de minerai et le manque de nouveaux grands projets miniers, ce qui limite la capacité de réponse des producteurs aux niveaux de prix actuels. Les stocks dans les entrepôts liés au LME se maintiennent à des niveaux jugés bas, renforçant la perception d’un marché tendu.
La hausse récente est aussi alimentée par des facteurs financiers, notamment le rachat de positions vendeuses (short covering) et l’ajustement brutal des positions spéculatives sur les marchés à terme, qui ont amplifié le mouvement haussier à court terme. Des révisions à la hausse des objectifs de cours par de grandes banques d’investissement – comme les scénarios de prix record évoqués par Citi – ont contribué à nourrir ce rally.
L’impact de cette hausse sur les économies émergentes, comme l’Algérie, sera important, notamment sur les secteurs de la construction, de l’électromécanique et des câbles électriques, qui voient leurs intrants grimper de 25-35% depuis début 2025. Cela freinerait les projets d’infrastructures et d’énergie renouvelable malgré les ambitions nationales. Cette pression inflationniste pèse sur les entreprises importatrices, amplifiée par une dépendance aux achats mondiaux en l’absence de production locale significative.
Des prévisions 2026 toujours haussières mais plus incertaines
Plusieurs grandes maisons de recherche, dont J.P. Morgan, anticipent la poursuite d’un marché déficitaire en 2026, avec un manque de plusieurs centaines de milliers de tonnes de cuivre raffiné. Dans ce scénario, le prix moyen pourrait graviter autour de 11 000–12 500 dollars la tonne, avec des pointes plus élevées en cas de nouvelles tensions sur l’offre.
Cette vision optimiste reste toutefois conditionnée à la tenue de la croissance chinoise et à l’absence de choc macroéconomique majeur ; un ralentissement plus marqué ou un durcissement monétaire inattendu pourrait provoquer des corrections rapides sur un marché aujourd’hui très « long » en positions spéculatives. À court terme, la volatilité devrait donc rester élevée, mais le biais fondamental demeure clairement orienté à la hausse tant que la combinaison « transition énergétique + sous‑investissement minier » n’est pas résorbée.