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Fonds souverain : l’Éthiopie surpasse l’Algérie sans une goutte de pétrole

Par Yasser K
22 mai 2025

Avec 45 milliards de dollars d’actifs, l’Éthiopie, pays sans pétrole, s’impose en tête des fonds souverains africains, devant l’Algérie et ses 16,3 milliards de dollars issus de deux décennies d’accumulation pétrolière. Deux nations, deux modèles, une même ambition : transformer leur richesse en levier de développement.

Ethiopian Investment Holdings bouscule tous les codes. Créée en 2021, cette société de holding supervise 40 entreprises nationales stratégiques, d’Ethiopian Airlines à Ethio Telecom, sans compter sur une seule goutte d’or noir. Son expansion récente, avec l’intégration de huit institutions supplémentaires dont Ethiopian Railway Corporation, témoigne d’une vision audacieuse : construire un empire industriel public.

Cette approche tranche radicalement avec le modèle traditionnel des fonds souverains. Là où d’autres pays capitalisent sur leurs rentes énergétiques, l’Éthiopie mise tout sur la consolidation de ses actifs productifs. Le pari semble payant : 45 milliards de dollars placent ce fonds au 34e rang mondial, un exploit pour un pays qui a choisi la voie de la diversification industrielle.

L’Algérie, vingt ans de prudence pétrolière

Face à cette révolution éthiopienne, l’Algérie a choisi une voie différente depuis la création de son fonds de régulation des recettes en 2000. Ce mécanisme applique une logique contra-cyclique : thésauriser les surplus pétroliers au-dessus du seuil budgétaire de référence pour absorber les chocs futurs. Cette stratégie d’amortisseur économique a permis de générer 3,7 milliards de dollars de revenus en 2024.

La différence d’approche se reflète dans les performances relatives. L’Éthiopie construit sa richesse sur des entreprises qu’elle contrôle intégralement, créant un écosystème économique diversifié. L’Algérie, positionnée au 50e rang mondial, a développé sur vingt-quatre ans une expertise de gestion des revenus pétroliers qui lui permet d’affronter les cycles économiques.

Deux philosophies, deux défis

L’Algérie fait face à des contraintes budgétaires croissantes. Le déficit prévu pour 2025 s’élève à plus de 62 milliards de dollars, soit 21,8% du PIB selon le ministère des Finances. Cette situation place le fonds de régulation au cœur de la stratégie de financement public, transformant chaque décision d’allocation en arbitrage entre stabilisation conjoncturelle et investissement de long terme.

L’Éthiopie navigue dans un environnement différent. Ses entreprises publiques doivent maintenir leur compétitivité face à la concurrence internationale tout en générant les rendements nécessaires à la croissance du fonds. Ethiopian Airlines, compagnie de référence continentale, ou la Banque commerciale d’Éthiopie évoluent sur des marchés où la performance opérationnelle détermine directement la valorisation des actifs. Cette autonomie représente à la fois une force et un défi : comment faire croître des entreprises publiques dans un environnement concurrentiel mondial ?

Deux voies vers la souveraineté économique

L’expérience algérienne démontre les bénéfices d’une gestion disciplinée des revenus pétroliers. Malgré les pressions budgétaires actuelles, le pays maintient sa position dans le peloton de tête africain grâce à une accumulation méthodique sur plus de deux décennies. Cette approche offre une protection contre la volatilité des marchés énergétiques, même si elle expose l’économie aux aléas des cours internationaux.

L’innovation éthiopienne ouvre une perspective différente. En concentrant ses efforts sur la consolidation d’entreprises publiques performantes, le pays construit un patrimoine économique moins dépendant des fluctuations externes. Cette stratégie présente l’avantage de créer de la valeur ajoutée domestique, mais elle requiert une expertise managériale élevée pour maintenir la compétitivité des actifs.

Le classement Forbes Middle East révèle finalement que la réussite des fonds souverains africains ne dépend pas uniquement de la dotation en ressources naturelles. Elle résulte d’une vision stratégique cohérente, adaptée aux spécificités économiques de chaque pays. L’Algérie et l’Éthiopie, par leurs approches distinctes, tracent deux chemins viables vers l’autonomie financière continentale.

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