L’écart abyssal entre le dinar officiel et le marché noir fait perdre jusqu’à 80% de leur pouvoir d’achat aux entraîneurs étrangers du championnat algérien. Les clubs, coincés entre contrôles de change et sanctions FIFA, peinent à convaincre.
Sur le papier, un entraîneur étranger payé 30 millions de dinars par mois en Ligue 1 algérienne touche l’équivalent de 207 000 euros au taux officiel de 145 dinars pour un euro. Dans la réalité du marché parallèle, où l’euro s’échangeait à 280 dinars en novembre 2025, ce même salaire ne vaut plus que 107 000 euros. Soit une perte sèche de près de 50%.
Cette distorsion monétaire, conséquence directe des contrôles de change imposés par la Banque d’Algérie pour préserver des réserves qui s’élèvent aujourd’hui à 47 milliards de dollars, met le football professionnel algérien dans une impasse. Les entraîneurs étrangers refusent catégoriquement d’être payés en dinars, conscients qu’ils ne pourront pas rapatrier leur argent à sa valeur réelle. Certains clubs se retrouvent contraints de négocier des arrangements via le marché noir, avec tous les risques juridiques que cela comporte.
Le CS Constantine illustre ces tensions de manière symptomatique. Fin novembre, lors d’une conférence de presse, Tarek Arama, directeur général intérimaire du club, a multiplié les appels aux supporters pour remplir le stade et s’est concentré sur les objectifs sportifs en championnat et en coupe. En effet, le club peine à recruter des profils étrangers dans ces conditions, et sa trésorerie fragile ne lui permet aucune marge de manœuvre.
Kabylie : du refus du dinar à l’interdiction de recrutement
La JS Kabylie, elle, est déjà au pied du mur. Son entraîneur Josef Zinnbauer refuse obstinément les paiements en dinars, prolongeant une crise qui a valu au club une interdiction de recrutement prononcée par la FIFA pour 600 000 euros d’impayés envers un club turc. Il a fallu l’intervention du wali et de la Fédération algérienne de football (FAF), via le ministère du Commerce, pour débloquer des fonds destinés au staff technique.
Mais la situation reste volatile; les revenus de compétitions africaines, bloqués par cette rigidité monétaire, représentent une perte estimée entre 5 et 10 millions de dollars par an. La prime du marché noir, qui atteint 80%, grignote méthodiquement la compétitivité des clubs algériens face à leurs rivaux maghrébins.