Le directeur exécutif de Chevron pour le développement des affaires institutionnelles, Frank Mount, était à Alger hier mercredi. Il a été reçu par Nordine Daoudi, PDG de Sonatrach, au siège de la compagnie nationale. Une visite de courtoisie en apparence, mais qui intervient à un moment charnière pour la concrétisation d’un accord signé il y a plusieurs mois.
Frank Mount a profité de cette rencontre pour féliciter Nordine Daoudi suite à sa nomination à la tête de Sonatrach. Mais au-delà des civilités d’usage, les deux parties ont échangé leurs visions sur les relations de coopération entre les deux entreprises et discuté de l’état d’avancement des négociations visant à concrétiser l’accord de principe signé entre Sonatrach et Chevron le 13 juin 2024.
Cet accord porte sur le développement des ressources pétrolières et gazières dans les zones d’intérêt commun identifiées dans les bassins d’Ahnet et de Berkine. Presque cinq mois après la signature, la visite de Mount témoigne d’une volonté de passer de l’intention à la réalisation concrète.
Un signal politique dans un contexte régional tendu
Dans les grandes entreprises pétrolières, les déplacements de cadres dirigeants sont calibrés. Chevron a multiplié les contacts avec l’Algérie ces derniers temps, avec notamment des visites de Joe Cook, vice-président au développement commercial durant l’été. Mais envoyer Frank Mount, directeur exécutif, c’est franchir un palier dans la hiérarchie des signaux. On ne mobilise pas un cadre de ce niveau pour de simples félicitations protocolaires. On le fait quand il faut débloquer des dossiers, aligner les visions au plus haut niveau, donner une impulsion politique à des négociations techniques qui peuvent parfois s’enliser.
Le timing de cette visite compte aussi. Elle survient alors que les relations entre Alger et Rabat traversent l’une de leurs périodes les plus difficiles, avec une rupture diplomatique qui ne dit plus son nom. Washington multiplie actuellement les efforts pour imposer un plan de paix entre l’Algérie et le Maroc sur la question du Sahara occidental. Dans ce contexte délicat, les États-Unis continuent parallèlement de développer leurs relations énergétiques avec l’Algérie, sans fanfare mais avec constance.
Par ailleurs, la guerre en Ukraine a redessiné les priorités énergétiques. L’Europe, privée du gaz russe, s’est tournée vers des alternatives. L’Algérie, avec ses pipelines méditerranéens et ses réserves importantes, est redevenue un partenaire incontournable. Les bassins d’Ahnet et de Berkine, visés par l’accord avec Chevron, recèlent un potentiel que les majors ne peuvent plus ignorer.
Pour Alger, faire venir un cadre de ce niveau cinq mois après la visite de son vice-président au développement commercial est un signe positif. Cela montre que Chevron prend le dossier au sérieux, qu’elle y consacre des ressources humaines de haut niveau, qu’elle veut faire avancer les choses. Sur le plan bilatéral, la nomination récente de Nordine Daoudi à la tête de Sonatrach offrait un prétexte parfait pour cette visite. Mais au-delà des félicitations, Chevron veut transformer l’accord de principe de juin 2024 en projets concrets.





