Le feu vert accordé par l’Espagne pour exporter des ovins vivants vers l’Algérie provoque une profonde dissension au sein de la filière espagnole. À partir du 21 avril, cette nouvelle autorisation, limitée aux animaux de six à 24 mois destinés au sacrifice, déchaîne les passions entre éleveurs et industriels de la viande, rapporte le journal espagnol El Debate.
D’un côté, les éleveurs célèbrent cette opportunité qui leur permet d’échapper à l’emprise des grands acheteurs traditionnels comme le Maroc. Apag Extremadura Asaja défend ardemment cette ouverture, craignant que des “goulets d’étranglement” dans la commercialisation ne fassent chuter les prix au détriment des producteurs.
Face à eux, l’Association nationale des industries de la viande d’Espagne (Anice) monte au créneau. Son PDG Giuseppe Aloisio fustige une “solution de facilité qui nuit à la chaîne de la viande” et “affecte directement la compétitivité du secteur”. Pour l’industrie, cette décision menace “une partie fondamentale de la chaîne de valeur”, déplaçant l’activité vers “un marché spéculatif” à la merci des fluctuations.
Cette bataille commerciale se déroule dans un contexte particulièrement tendu : l’Espagne a perdu 15% de son cheptel ovin reproducteur en cinq ans, provoquant une flambée historique des prix. Les abattoirs espagnols redoutent désormais une aggravation de leurs difficultés d’approvisionnement déjà critiques.
L’Unión de Uniones, par la voix de Josep Puig, tente une position médiane en rappelant qu’on “ne peut pas mettre tous les œufs dans le même panier”, jugeant l’exportation d’animaux vivants “essentielle” pour maintenir la viabilité des élevages.
Cette autorisation, apparemment technique, révèle ainsi les profondes fractures d’une filière où éleveurs et transformateurs peinent à aligner leurs intérêts économiques, illustrant parfaitement les tensions qui traversent aujourd’hui de nombreuses chaînes agroalimentaires européennes.