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Hécatombe de Mina : les lieux saints étaient sans serviteurs

Par Yacine Temlali
25 septembre 2015
Pour les autorités saoudienne, les victimes des "bousculades" de Mina sont... responsables de leur propre mort.

Après 2006, on avait cru qu’on n’entendrait plus jamais parler de « bousculade », cet euphémisme macabre destiné d’emblée à rendre les pèlerins responsables de leur propre mort et à dégager la responsabilité des autorités saoudiennes.

 

La catastrophe de Mina, au moment du rituel de « ramy al-Jamarat », qui a fait des centaines de mort n’aurait pas dû avoir lieu. Il y a eu en 2006, sur les mêmes lieux et dans le même contexte, 364 pèlerins morts dans ce qu’on a appelé – et on le fait encore aujourd’hui – une « bousculade ».

Les leçons étaient censé avoir été tirées, des infrastructures mises à jour et des dispositifs de sécurisation accompagner le mouvement, très délicat, du plus grand rassemblement au monde de personnes sur une zone restreinte et pendant une durée déterminée.

Après 2006, on avait cru qu’on n’entendrait plus jamais parler de « bousculade », cet euphémisme macabre destiné d’emblée à rendre les pèlerins responsables de leur propre mort et à dégager la responsabilité des autorités saoudiennes.

Les premières déclarations de responsables saoudiens ont, en effet, très rapidement mis en cause « l’indiscipline » des pèlerins. L’explication, indécente au sens plein du terme, est venue du ministre de la Santé Khaled al-Faleh qui a affirmé que si « les pèlerins avaient suivi les instructions, on aurait pu éviter ce genre d’accident ».

Quelques heures plus tard, les responsables saoudiens ont commencé à mettre à bémol en invitant à ne pas s’empresser de conclure. Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général Mansour Turki, a ainsi recommandé de « ne pas devancer les conclusions de l’enquête » qui a été décidée par le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Nayef.

 

Le déni confondu par l’image

 

Un recul qui s’explique aisément. A l’ère de l’Iphone, le déni est très vite confondu par l’image. Et des vidéos montrant le début de la catastrophe confirment bien ce que disent les Iraniens : la cause de la catastrophe a été le fait d’un chemin « inexplicablement fermé » sur le parcours des Jamarat.

On peut les voir ces pauvres pèlerins bloqués devant cette affreuse barrière et l’entassement par milliers de personnes alors que le flux ne s’arrête pas derrière. Une catastrophe due clairement à la mauvaise gestion et les responsables saoudiens auront du mal à se disculper en mettant en cause « l’ignorance » présumée des pèlerins.

Ces hajji étaient leurs hôtes. Ils étaient au pays du « serviteur des lieux saints ». Et on peut dire sans hésitation que les lieux saints n’ont pas été bien servis. Ses hôtes aussi. Le pèlerinage 2015 a été précédé par la catastrophe de la grue de la Grande Mosquée de la Mecque. Il se termine, affreusement, par un grand carnage.

La responsabilité des autorités saoudiennes est écrasante. La gestion du pèlerinage est une charge qu’ils se doivent d’accomplir au mieux. Le terme de « serviteur des deux lieux saints » ne peut être compris uniquement comme un apparat de type religieux qui permet d’entretenir une image.

En 1986, feu le roi Fahd s’est attribué le titre de « serviteur des lieux saints » ou des « deux saintes mosquée », une décision prise quelques années après la chute du chah et l’instauration de la république islamique en Iran en 1979.

« Se servir des lieux saints »

Ce « titre » a été reconduit par les successeurs du roi Fahd. Et pour cause, il consacre la souveraineté saoudienne sur les lieux saints contre les velléités de contestation de leur légitimité sur les lieux saints par les iraniens notamment.

Durant les premières années de la république islamique iranienne, le pèlerinage à la Mecque était marqué par des affrontements entre des affrontements réguliers entre les pèlerins iraniens et la police saoudienne.

Le titre de « serviteur des deux lieux saints » entrait clairement dans le cadre de cette compétition entre les deux régimes pour le leadership du monde musulman.

On pourrait dire que c’est de « bonne guerre ». A condition cependant de ne pas se contenter de « se servir des lieux saints » et d’assumer effectivement la charge et de permettre aux pèlerins d’effectuer le Hajj dans des conditions correctes de sécurité.

Cela n’est manifestement pas le cas. Le pèlerinage 2015 est une tâche sombre pour le roi saoudien. Les lieux saints qu’il était censé servir ont été ensanglantés par une mauvaise gestion manifeste de ce grand rassemblement religieux.

 

 

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