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Impôt sur la fortune : seulement 67 contribuables… pour 2 700 millionnaires

Par Yasser K
30 août 2025
L’impôt de solidarité sur la fortune, instauré par la Loi de finances 2022, n’a concerné que 67 contribuables en Algérie.

Seulement 67 contribuables ont payé l’impôt sur la fortune en 2022, alors que l’Algérie compte aujourd’hui près de 2 700 millionnaires.

Trois ans après son instauration, l‘impôt de solidarité sur la fortune (ISF) révèle un bilan pour le moins surprenant. Selon la dernière étude disponible de Finabi Conseil datant de 2023, seuls 67 contribuables ont effectivement acquitté cet impôt au titre de l’exercice 2022. Ces quelques redevables ont généré des recettes fiscales dérisoires de 10 millions de dinars, soit moins de 75 000 dollars.

Ce chiffre interpelle d’autant plus que l’Africa Wealth Report 2025 dénombre 2 700 millionnaires en dollars sur le territoire algérien. Contrairement aux données fiscales, l’Africa Wealth Report repose sur des estimations de la richesse privée « investissable » (actifs financiers, dépôts, portefeuilles), croisées avec des données économiques et migratoires.

Bien que sa méthodologie reste critiquée pour son manque de transparence, l’ordre de grandeur fourni met en évidence un écart réel entre le potentiel de taxation et les recettes effectives.

Un dispositif fiscal qui peine à trouver sa cible

L’ISF algérien vise pourtant les patrimoines nets dépassant 100 millions de dinars, avec une grille de taux comprise entre 0,15 % et 1 %. Sur le papier, le mécanisme paraît adapté pour capter une partie substantielle des grandes fortunes nationales. Dans les faits, l’écart entre le potentiel théorique et la réalité des encaissements pose des questions sur l’efficacité du système.

Finabi Conseil pointait déjà en 2023 plusieurs dysfonctionnements structurels. Le cabinet d’audit identifiait notamment des lacunes importantes dans la numérisation des données fiscales, foncières, bancaires et immobilières. Cette fragmentation informationnelle complique l’identification précise des contribuables concernés et limite la capacité de contrôle de l’administration fiscale.

L’estimation patrimoniale se révèle également complexe dans un environnement où de nombreux actifs échappent encore aux circuits formels. L’économie informelle, particulièrement développée en Algérie, offre de multiples possibilités d’optimisation fiscale, voire d’évitement pur et simple.

Aucune statistique plus récente n’a été publiée depuis l’étude Finabi de 2023, ce qui ne permet pas d’évaluer une éventuelle évolution du dispositif pour les exercices 2023 et 2024. Cette absence de données publiques actualisées contraste avec la transparence attendue pour un impôt censé participer à la redistribution des richesses.

La stagnation des recettes autour de 10 millions de dinars pendant les premières années d’application révèle l’effet symbolique plus que redistributif de cette mesure fiscale. Pour comparaison, ces montants représentent une fraction infinitésimale du budget de l’État algérien.

Nouvelles dispositions pour 2025 : carotte et bâton

Face à ce bilan mitigé, la Loi de finances 2025 introduit des ajustements procéduraux. Le gouvernement a accordé un délai exceptionnel aux contribuables concernés en repoussant la date limite de déclaration au 30 juin 2025, contre le 31 mars habituel. Cette mesure vise à relancer la régularisation des redevables potentiels.

En parallèle, l’administration fiscale brandit la menace d’une taxation d’office pour les contribuables défaillants, conformément à l’article 281 undecies du Code des impôts directs et taxes assimilées. Cette approche coercitive pourrait inciter davantage de redevables à régulariser leur situation.

Toutefois, ces aménagements restent essentiellement procéduraux. Aucune annonce ne concerne le renforcement des moyens de contrôle ou l’amélioration des systèmes d’information fiscale, pourtant identifiés comme des freins structurels par l’étude Finabi.

L’évolution du nombre de millionnaires algériens, estimé à 2 700 personnes selon les dernières données disponibles, suggère un potentiel fiscal considérable. Cette population fortunée a progressé ces dernières années, portée notamment par l’immobilier, les activités commerciales et les investissements dans les secteurs porteurs.

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