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Industrie automobile et 5ème campagne électorale de Bouteflika, ce que Sellal et Ouyahia ont dit au juge

Par Mecipsa Amokrane
4 décembre 2019

Le procès sur les affaires de corruption liées à l’industrie du montage automobile impliquant les deux anciens premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal ainsi que le fils de ce dernier, mais aussi d’autres anciens hauts responsables de l’Etat a été marqué une nouvelle fois par le retrait des avocats de la défense. Ces derniers ont poarlé de « l’absence des conditions pour un procès équitable ».

Le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, a été pris d’assaut par les journalistes, et des citoyens curieux venus en grand nombre. Un impressionnant dispositif sécuritaire a été déployé autour du tribunal.

L’entrée au tribunal pour les journalistes était difficile en raison du « nombre limité de badges » distribués aux représentants de quelques médias arrivés très tôt le matin.

Un écran sur lequel on pouvait suivre le procès était placé du premier étage du tribunal où se déroule le procès et dans la salle 1, au rez-de-chaussé. L’image et le son étaient médiocres. Les prévenus arrivent à l’intérieur de la salle. Ils sont placés aux premiers rangs du côté droit de la salle d’audience. Les présents dans la salle pleine à craquer sont mettent debout pour regarder les anciens premiers ministres et ex-membres du gouvernement. « Je n’ai jamais imaginé que ce jour arriverait. Je rêve », dit une journaliste.

Aussitôt le procès entamé, les détenus défilent. C’est l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia qui passe en premier. Décontracté, il répond aux questions posées par le juge et le procureur de la République. Le juge lui explique que vu le retrait des avocats de la défense, il a le droit de répondre ou pas aux questions qui lui seront adressées.

A voix haute, Ahmed Ouyahia répond aux questions du juge et du procureur. « On dirait qu’il est en train de présenter la loi de finances au parlement », lance une journaliste étonnée.

 « Oui je n’ai pas attendu le décret présidentiel pour demander aux douanes et aux services du ministère du Commerce pour débloquer les marchandises liées à l’industrie automobile car les concessionnaires allaient baisser le rideau si on avait attendu six mois, le temps nécessaire pour la promulgation du décret », répond Ahmed Ouyahia au juge qui lui a demandé pour quelle raison il avait « violé la loi ». 

Ouyahia a aussi noté que ces décisions entraient dans le cadre de la politique générale du gouvernement. Il a notamment été interrogé sur son patrimoine non déclaré et  sur les entreprises de son fils et de son épouse. D’après lui, les deux entreprises n’ont aucun lien avec sa fonction.

Les noms de deux personnes reviennent souvent dans ce dossier. Il s’agit de Abdeslam Bouchouareb, ancien ministre de l’Industrie et des mines au moment de la réforme du marché automobile, actuellement en fuite, et l’ancien patron du groupe Elscom, Abderehmane Achaibou, homme d’affaire qui a dénoncé les pressions exercées sur lui par Bouchouareb qui a « refusé de de lui attribuer la licence d’exploitation ».

Abdelmalek Sellal et son fils

Portant un costume gris sans cravate, l’ancien premier ministre Abdelmalek Sellal qui assis devant son fils Fares est appelé à se présenter devant la barre. Le teint pâle, le ministre connu pour son sens de l’humour semblait fatigué.

« Privilèges », « Conflit d’intérêts » et « financement de campagne électorale » de Abdelaziz Bouteflika, Abdelmalek Sellal tente de se défendre mais à chaque fois, le juge lui rappelle qu’il doit juste répondre aux questions posées. Au moment de la modification de la loi sur l’importation et l’assemblage automobile SKD, son fils Fares, était actionnaire à hauteur de 23% dans la société Mazouz, une activité sur laquelle le juge a posé des questions.

Il est notamment interrogé au sujet de correspondances échangées avec l’ancien ministre de l’Industrie, Bouchouareb concernant l’élaboration du cahier des charges relatif a au montage automobile. Le juge demande au Premier ministre si le décret régissant cette activité a été respecté, et Sellal affirme que « non ». Il en impute la responsabilité au ministre de l’Industrie. En réponse à la dernière question relative à la non déclaration du patrimoine, notamment le montant de la vente d’un véhicule haut de gamme, l’ancien Premier ministre dit « ne pas en connaitre le montant » et pour preuve : « je ne sais pas conduire ».

L’ancien ministre de l’Industrie, Youcef Yousfi, interrogé sur l’affaire de l’assemblage automobile, a dit que pour lui, la priorité était accordée à l’investissement. Il a ajouté qu’il appliquait les instruction du Premier ministre et qu’il n’était pas un homme de droit.   

Le juge a reproché à Yousfi le fait d’avoir délivré des privilèges à des gens qui ne le méritaient pas. Dans le même dossier, l’autre ancien ministre de l’Industrie, Mahdjoub Bedda s’est défendu en disant qu’il n’avait pas été informé au sujet de l’existence du cahier des charges.

Le grand déballage

Mais le grand déballage a été fait par Abdelghani Zaâlane, ex-ministre des Travaux publics et ancien directeur de campagne de Bouteflika, pour le cinquième mandat. Il a révélé tous les noms de ceux qui ont financé la campagne électorale de Bouteflika. Selon l’ancien directeur de campagne « 75 milliards de centimes ont été collectés auprès de KIA , Benhamadi, Bellat, Mazouz,  SPA Metidji et un citoyen dont il n’a pas cité de nom ». Zaalane assure « n’avoir reçu aucun centime de la part de quiconque ni en espèce ni par chèque à part les montants déclarés ».

De son côté, Abdelmalek Sellal quand a souligné au juge qu’il n’était pas chargé de gérer la partie financiére de ladite campagne de Bouteflika mais la partie administrative.

L’audience est levée et c’est l’occasion pour les avocats de la défense de communiquer au sujet de leur retrait de l’audience. Selon eux, « c’est un procès politique qui a été préparé dans la précipitation. Les conditions d’un procès équitable ne sont pas réunies et les tenants du pouvoir veulent à tout prix rendre le verdict dans ce dossier afin d’inciter les gens à aller voter malgré le rejet et la colère de la rue ».

Autour de 19H, le juge du tribunal de Sidi M’hamed annonce que le procès se poursuivra demain à partir de 10H du matin.

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