Le Premier ministre François Bayrou a présenté, mardi 15 juillet, les grandes lignes de son projet budgétaire pour 2026. Avec un objectif ambitieux : ramener le déficit public à 4,6 % du PIB, contre 5,8 % actuellement, en amorçant une trajectoire de retour sous les 3 % d’ici 2029. Pour cela, le gouvernement français table sur 43,8 milliards d’euros d’économies, un chiffre supérieur aux 40 milliards initialement évoqués, afin d’absorber notamment l’augmentation du budget des armées.
Une équation budgétaire périlleuse
Sur le papier, la logique est claire : réduire drastiquement les dépenses pour contenir la dette. Mais dans les faits, la mise en œuvre du plan s’annonce particulièrement ardue. Le gouvernement veut geler 4,8 milliards d’euros de dépenses de l’État, supprimer 3 000 postes de fonctionnaires en 2026, et ne pas remplacer un fonctionnaire sur trois partant à la retraite l’année suivante. À cela s’ajoute une vaste opération de « recentrage » de l’action publique, avec la suppression de 1 000 à 1 500 postes dans des agences jugées « improductives » (5,2 milliards d’euros d’économies attendues).
Les collectivités locales seront également mises à contribution à hauteur de 5,3 milliards d’euros, soit 12 % de l’effort global, une mesure déjà jugée « inacceptable » par les élus locaux.
Prestations gelées et franchises alourdies
Le plan prévoit aussi un important resserrement des dépenses sociales, à hauteur de 5,5 milliards d’euros. Cela comprend une lutte renforcée contre les arrêts maladie jugés abusifs et un doublement de la franchise sur les médicaments, portée à 100 euros par an. Autre mesure controversée : le gel temporaire de l’indexation des prestations sociales (RSA, retraites…) sur l’inflation. Cette « année blanche » générerait 7,1 milliards d’euros d’économies, mais suscite déjà une levée de boucliers des associations de lutte contre la précarité, qui dénoncent un plan « catastrophique pour les plus modestes ».
Des hausses fiscales ciblées mais critiquées
Côté recettes, le gouvernement mise sur 4,2 milliards d’euros grâce à des mesures dites d’« équité fiscale » : taxation des petits colis, contribution sur les hauts revenus… La suppression de certaines niches fiscales et sociales devrait rapporter 3,4 milliards d’euros supplémentaires. À cela s’ajoutent 2,3 milliards d’euros attendus de la lutte contre la fraude et 1,8 milliard issus de réformes structurelles.
Mais c’est une mesure symbolique, visant à générer 4,2 milliards d’euros, qui cristallise la controverse : la suppression de deux jours fériés, le lundi de Pâques et le 8 mai. Un choix que François Bayrou justifie par leur faible charge symbolique ou religieuse, mais qui a été immédiatement qualifié de « provocation » par l’opposition.
Une opposition vent debout
Les critiques ont fusé de toutes parts. Marine Le Pen a promis de déposer une motion de censure si le plan n’était pas « revu », dénonçant un projet « injuste » et un manque d’économies sur « l’immigration » ou les subventions aux énergies renouvelables. Du côté de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé un plan de « destruction sociale », tandis qu’Olivier Faure (PS) a qualifié les mesures de « violentes » pour les familles.
Le président du Comité des finances locales, André Laignel, a mis en garde contre une facture « bien plus salée » que prévu pour les collectivités, menaçant d’appeler le Parlement à rejeter le budget.
« Un langage de vérité » selon Bayrou
Face à la fronde, François Bayrou défend un discours de responsabilité : « Nous ne pouvons plus faire semblant de ne pas voir ces défis. » S’il admet que le plan est « perfectible » et ouvert à des ajustements, il prévient : « Améliorer ne peut pas vouloir dire reculer. » Pour le Premier ministre, ce plan n’est qu’un « préambule », car la France a besoin de « mesures fortes ».
Mais à huit mois de l’examen budgétaire au Parlement, le défi n’est pas seulement financier. Il est politique. Entre arbitrages techniques et résistances sociales, la concrétisation de ce plan s’annonce aussi périlleuse que nécessaire, dans un climat de défiance grandissante.