L’Algérie multiplie les initiatives pour s’imposer comme hub énergétique continental. En recevant une délégation de la CEDEAO, Alger mise sur la coopération Sud-Sud pour financer ses projets transfrontaliers.
Le ministre algérien de l’Énergie, Mohamed Arkab, a reçu mardi une délégation de la Banque d’investissement et de développement de la CEDEAO (BIDC), menée par le vice-président Olagunju Ashimolowo, dans le cadre des discussions visant à obtenir un financement pour plusieurs projets énergétiques d’envergure continentale, notamment le gazoduc transsaharien.
Le gazoduc transsaharien (TSGP) a monopolisé l’attention des deux délégations. Cette infrastructure de 4 128 kilomètres doit relier les champs gaziers nigérians aux terminaux algériens via le Niger, avec une capacité de transport de 30 milliards de mètres cubes annuels. Le coût estimé dépasse les 13 milliards de dollars.
Après des années de stagnation administrative, le projet reprend de la vitesse. En février 2025, les trois pays partenaires ont mandaté le cabinet britannique Penspen pour actualiser l’étude de faisabilité. Cette analyse, attendue pour septembre, doit couvrir les volets financiers, environnementaux et techniques avant le lancement de la phase d’ingénierie.
Les promoteurs du projet tablent sur une mise en service en 2027, sous réserve de bouclage financier et de conditions sécuritaires favorables. Pour Alger, cet ouvrage représente un double enjeu : affirmer son statut de hub énergétique continental tout en diversifiant ses débouchés gaziers vers l’Europe.
Énergies renouvelables : l’Algérie vend son expertise
Au-delà des hydrocarbures, l’Algérie a mis en avant son savoir-faire dans les énergies alternatives. Mohamed Arkab a vanté l’expérience algérienne dans l’utilisation du GPL et du propane pour électrifier les zones isolées, une solution qu’Alger propose d’exporter vers d’autres marchés africains confrontés aux mêmes défis d’accessibilité.
Le ministre a également rappelé les projets solaires nationaux et les ambitions d’interconnexions électriques régionales. Si les capacités installées restent encore modestes par rapport aux objectifs gouvernementaux, les autorités affichent leur volonté d’accélérer la transition énergétique. Les projets de raccordement transfrontaliers visent à créer un marché électrique régional et à stimuler l’industrialisation continentale.
La BIDC, un partenaire aux moyens limités mais stratégique
La délégation de la BIDC s’est montrée intéressée par la proposition algérienne. Toutefois, les capacités financières de l’institution ouest-africaine restent modestes face à l’ampleur des investissements requis. Son rôle consiste davantage à fédérer les financements et à coordonner les partenariats avec d’autres bailleurs continentaux comme la Banque africaine de développement ou Afreximbank.
Pour Olagunju Ashimolowo, ces projets énergétiques constituent un pilier de l’intégration africaine. L’appui de la BIDC pourrait servir de catalyseur pour attirer des financements additionnels et crédibiliser des dossiers souvent perçus comme trop ambitieux par les investisseurs.
Des défis de taille à surmonter
Malgré les déclarations d’intention, plusieurs obstacles demeurent. Le bouclage financier représente le défi principal, notamment pour le gazoduc transsaharien qui nécessite des garanties souveraines et des accords de partage des risques entre partenaires. La sécurisation des corridors énergétiques, particulièrement dans la bande sahélienne, constitue un autre enjeu sensible.
L’harmonisation des cadres réglementaires entre pays partenaires reste également à parfaire pour faciliter les flux énergétiques transfrontaliers. Cette rencontre d’Alger révèle néanmoins une nouvelle dynamique : l’énergie devient un vecteur privilégié de coopération Sud-Sud en Afrique, avec l’Algérie positionnée comme carrefour continental.