Un nouveau décret détaille la procédure d’autorisation préalable pour toute cession d’actions ou de parts sociales à des étrangers dans les secteurs dits “stratégiques”. Un outil de souveraineté qui clarifie les règles, tout en laissant une large marge d’appréciation à l’État.
Le décret exécutif n° 25-304 du 16 novembre 2025 définit les modalités d’octroi de l’autorisation préalable de cession, au profit de personnes physiques ou morales étrangères, d’actions ou de parts sociales détenues dans le capital d’une société de droit algérien exerçant dans un secteur stratégique.
Concrètement, toute cession de ce type est désormais soumise à l’aval du ministère de tutelle de la société concernée. La demande doit être introduite par la société elle-même et préciser l’identité du cédant, du cessionnaire, le nombre de titres, leur pourcentage dans le capital, leur valeur et la nouvelle structure du capital après l’opération.
Au-delà de ces informations de base, le décret impose un volet de conformité assez lourd : statuts, extraits du registre du commerce, documents fiscaux, mais aussi casier judiciaire du cessionnaire étranger, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une société. Là encore, le message est clair : l’État veut un droit de regard non seulement sur le profil économique de l’investisseur, mais aussi sur sa “respectabilité” au sens pénal et financier.
Enfin, pour les entreprises publiques économiques (EPE), une étape supplémentaire est imposée : toute demande doit être validée au préalable par le Conseil des participations de l’État (CPE). Cela verrouille davantage les éventuelles ouvertures de capital ou cessions de participations publiques au profit d’étrangers.
Un filtre inter-ministériel qui mêle économie, sécurité et réputation
Le caractère stratégique de ce dispositif apparaît surtout dans la manière dont la décision est prise. Le ministère de tutelle ne statue pas seul : il doit tenir compte des avis de plusieurs départements, dont la Défense nationale, les Affaires étrangères, l’Intérieur, la Justice, les Finances, le Commerce intérieur, la Santé, ainsi que de la Banque d’Algérie.
Au terme de ce circuit, l’administration dispose d’un délai maximal de 60 jours pour répondre, à compter de la remise du récépissé de dépôt. En cas d’avis favorable, une décision d’autorisation est notifiée au demandeur et des ampliations sont transmises aux Finances, au Commerce intérieur, à la Banque d’Algérie et à l’Agence algérienne de promotion de l’investissement.
Les motifs de rejet, eux, sont explicitement listés. La demande doit être refusée s’il existe des indices de situations pouvant affecter l’ordre et la sécurité publics, la santé publique ou les intérêts économiques du pays, ou si le cessionnaire est impliqué dans des actes de corruption ou de criminalité financière et économique.
Sur le plan économique, ce décret institutionnalise un contrôle des investissements étrangers dans les secteurs sensibles en mêlant trois registres : la sécurité nationale, via les références à l’ordre et à la sécurité publics ou à la santé ; la souveraineté économique, à travers la notion d’intérêts économiques du pays ; et la réputation de l’investisseur, au prisme de la corruption et de la criminalité financière. On se rapproche des mécanismes de filtrage des investissements étrangers que l’on retrouve dans l’Union européenne ou aux États-Unis, même si la liste précise des secteurs stratégiques reste définie par d’autres textes.





