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Le CPP échappe à Amar Saadani pour sombrer dans les dossiers de corruption (vidéo)

Par Maghreb Émergent 13 février 2015
Algérie CPP RadioM
Seul un pouvoir légitime et fort peut s’attaquer aux dossiers de la corruption.

Algérie CPP RadioM

 

Comment trouver un aspect positif, un seul, au scandale HSBC ? Le CPP a cherché, et a fini par trouver. On sait aujourd’hui que l’Algérie peut vivre avec beaucoup moins d’argent.

Amar Saadani n’a pas été cité une seule fois lors du CPP de jeudi 12 février. Mais on ne sait si le Café Presse Politique de RadioM a gagné au change, car emporté par les révélations sur les fortunes déposées auprès de HSBC en Suisse, le CPP s’est noyé dans les dossiers de corruption, de fuites de capitaux, de transferts illicites de devises et de trafics de toutes sortes. Pour conclure que la lutte contre la corruption n’est pas une question économique, mais politique.

440 Algériens détiennent 670 millions de dollars auprès de HSBC, en Suisse. Qui sont ces Algériens ? D’où provient cet argent ? El Kadi Ihsane a bon espoir d’obtenir la liste, étape cruciale pour aborder le reste. Les chiffres disponibles « ne renseignent pas tout à fait » sur les fortunes détenues par des Algériens à l’étranger, même s’ils « donnent une indication ». HSBC est en effet une banque connue depuis peu en Algérie.

Le CPP ne veut pas verser dans l’excès. Lyas Hallas, qui a beaucoup enquêté sur des affaires de corruption, note qu’il y a des Algériens qui ont pu ouvrir des comptes après avoir gagné de l’argent légalement. Abed Charef va dans le même sens, mais souligne que « dans un pays où tout est suspect, chaque euro déposé à la banque HSBC est en théorie d’origine douteuse ». Il y a de l’argent légal, mais « c’est une partie infime ».

Des mécanismes complexes

Lyas Hallas décortique les mécanismes qui permettent de réaliser ces transferts : commissions, surfacturation des importations, mais aussi transfert de devises achetées au noir. Ce qui dénote un manque de confiance dans l’économie algérienne, ajoute Abed Charef. Il y a aussi des pratiques très particulières, comme le fait, pour un importateur, de s’approvisionner auprès d’une entreprise étrangère qui lui appartient. Il n’est pas intéressé par les bénéfices réalisés en Algérie, car ce qui l’intéresse, c’est l’opération de transfert de devises réalisée. Lyas Hallas cite aussi la méthode consistant à offrir un salaire contre un travail inexistant à une personne pour plusieurs années, ce qui peut atteindre plusieurs millions de dollars.

La situation s’est tellement dégradée que d’autres pratiques sont apparues : une affaire de 400 millions de dollars de devises exportées illégalement par le biais de AGB Bank, révélée par l’APS, et des conteneurs vides ou remplis de gravats envoyés en Algérie, pour justifier les sorties de devises. Abed Charef souligne que « la corruption s’est sophistiquée ». « On n’est plus dans le pot de vin traditionnel, mais dans des transferts réalisés grâce à des contrats fictifs, à travers des sociétés-écran, dont l’argent transite par plusieurs banques dans les paradis fiscaux », dit-il.

L’Algérie n’est pas outillée pour lutter contre ce phénomène même si elle le voulait. El Kadi Ihsane note que l’Algérie ne peut même pas le faire face dans « un périmètre domestique », comme l’a révélé l’affaire AGB. L’Algérie « n’est pas efficace contre des systèmes primaires, elle ne peut pas l’être contre des systèmes complexes ».

Le dinar au cœur du problème

Comment sortir de cet engrenage ? El Kadi Ihsane pointe « la responsabilité historique » du gouverneur de la Banque d’Algérie (Mohamed Laksaci, ndlr), qui a laissé se creuser l’écart entre la valeur officielle du dinar et celle sur le marché informel. Le nœud, pour Abed Charef, c’est « la valeur du dinar ». « Il faut faire converger la valeur officielle du dinar et celle du marché noir », estime El Kadi Ihsane, qui souligne qu’il faut « de la transparence, mais pour cela, il faut de la volonté politique, et pour avoir de la volonté politique, il faut être sûr que parmi les dirigeants, il n’y a pas de responsable impliqué ». Inévitablement, le CPP débouche sur le terrain politique. Pour Abed Charef, seul un pouvoir légitime et fort peut s’attaquer à ces dossiers.

Souhila Benali demande s’il faut attendre de nouvelles révélations, d’autant plus que l’ex-candidat à la présidentielle, Ali Benflis, a estimé les trafics à 20 milliards de dollars. En tout état de cause, El Kadi Ihsane relève que ces exportations de devises resteront comme la marque de l’ère Bouteflika. Sous Houari Boumediène et Chadli Bendjedid, les transferts étaient internes, avec les crédits non remboursés accordés par le premier aux moudjahidine, et l’immobilier durant l’ère Chadli. Avec Bouteflika, c’est l’évasion massive de devises.

Abed Charef déplore toutefois que la presse occidentale se limite à publier ce qui lui convient, selon sa propre grille. Comme pour l’affaire Wikileaks, c’est une transparence partielle. Il trouve aussi un aspect positif à ce déballage : avec tout argent qui se perd, on découvre que l’Algérie peut vivre avec beaucoup moins d’importations.

Par ailleurs, si le CPP a échappé à Amar Saadani, il n’a pas échappé au gaz de schiste. D’autant plus que la situation dans le sud menace de se dégrader, avec la contestation montée d’un cran. Nejma Rondeleux, qui suit le dossier, a évoqué une montée de la tension. Risque de dérapage? Le pouvoir ne sait pas gérer les crises, ce qui risque de créer un nouvel abcès de fixation et un pourrissement. Les appréciations sur le gaz de schiste divergent, mais un point semble faire consensus au CPP : la crise du gaz de schiste est d’abord une crise de confiance.

Extraits vidéo : https://algeriefocus.com/bit.ly/1KTjfzL

 

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