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Maghreb

Le dynamisme économique de la vallée du Mzab a changé le rapport de force entre Mozabites et arabes, selon Mohamed Djelmani

Par Maghreb Émergent
6 avril 2014
Ghardaïa n'est plus que l'ombre d'elle-même.

Les évènements ayant secoué Ghardaïa durant ces trois derniers mois ont été le sujet samedi, du débat organisé par El Watan à l’hôtel Safir. La crise n’est pas résolue selon les conférenciers. L’accalmie de cette semaine est due, à leurs yeux, à la présence de l’armée dans les différents foyers de tension. Ils n’excluent pas la reprise des échauffourées.

 

La sociologue Fatma Oussedik, l’économiste Mohamed Djelmani et l’islamologue Said Djabelkhir ont abordé, chacun avec les outils que lui offre sa discipline, les causes de la violence qui endeuille Ghardaïa. Une violence qui trouve son origine dans la convergence de plusieurs facteurs liés à l’Histoire de la vallée du Mzab.
Selon Fatma Oussedik, «l’Etat central a déstructuré les institutions locales lesquelles ont perdu toute influence face au clientélisme mis en place par l’administration». Un état de fait qui, aux yeux de la sociologue, a ajouté aux vulnérabilités internes du pays. «On parle désormais de minorité ibadite. C’est dans l’air du temps géopolitique. Cela constitue un facteur d’instabilité dans un contexte global où les rapports de forces connaissent des bouleversements et où un ordonnateur supérieur de ce monde tâche de redistribuer les cartes dans un processus qui a vu la dislocation de plusieurs pays», a-t-elle averti.
Said Djabelkhir, qui est chercheur en soufisme estime, pour sa part, que la négation de la diversité religieuse –pas uniquement dans sa composante ibadite mais aussi, juive et chrétienne–, a ouvert la porte à toutes sortes d’extrémismes. «La salafisation des esprits en Algérie ne date pas d’hier. La propagande wahhabite a commencé avec les réformistes dans les années 1920-30 (allusion faite aux oulémas musulmans algériens, Ndlr). Et ce wahhabisme est en train de gagner du terrain à Ghardaïa», a-t-il indiqué. Cette affirmation est confirmée par Mohamed Djelmani qui a cité l’imam de la mosquée Hadj Messaoud à Ghardaïa. «Nous avons alerté les autorités, en vain.», a-t-il ajouté.
Dynamisme économique
L’économiste Mohamed Djelmani, lui-même mozabite et président le conseil d’une « achira » (clan, Ndlr), a préféré apporter un témoignage sur l’évolution de la vallée du Mzab durant les 50 dernières années plutôt que de lire les évènements. Il a ainsi énuméré trois étapes dans l’évolution économique du Mzab. «Avant, dans les cités mozabites de Ghardaïa, il n’y avait quasiment que les vieux, les femmes et les enfants. Les hommes immigraient dans villes du nord du pays pour commercer ou émigraient à l’étranger pour faire des études ou pour travailler. Il y avait aussi dans le Mzab peu de terres arables qui appartenaient pour la plupart aux mozabites. Dans les années 1960, une petite industrie est née à Ghardaïa. Des commerçants ont décidé de fabriquer des produits textiles, de mercerie et de quincaillerie qu’ils commercialisaient. Cette activité a commencé à fixer les populations, notamment les jeunes mozabites à Ghardaïa. La loi de mise en valeur agricole qui a vu les différentes achira délimiter de grandes surfaces, creuser des puits et faire fructifier des terres qui n’étaient pas exploitables à l’époque», a-t-il expliqué.
En marge de ce séminaire, Mohamed Djelmani a déclaré que ce dynamisme économique a changé le rapport de force entre arabes qui étaient plus nombreux et mozabites qui étaient moins présents à Ghardaïa. Et les mozabites, a-t-il affirmé, « cultivent toujours un ressentiment vis-à-vis de l’Etat qui a nationalisé une partie de leurs terres et les a redistribués au profit des arabes en vertu de la réforme agraire des années 1980 ». Selon des mozabites qui ont accompagné Mohamed Djelmani à l’hôtel Safir, les arabes avaient pour devise « khassem, takssem » (soit belliqueux et tu pourras partager avec le mozabite, Ndlr). Ils squattaient des terres de mozabites et allaient à l’arbitrage où les médiateurs finissaient par partager les terres entres les deux belligérants. Ce qui n’est plus possible maintenant.

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