Un rapport de la Banque mondiale publié le 3 décembre 2025 lance l’alerte: dans de nombreux pays en développement, le remboursement de la dette absorbe plus de ressources que les nouveaux financements reçus. Conséquence : les investissements dans la santé, l’éducation et les infrastructures sont fortement limités. L’Algérie, le Maroc et la Tunisie font face à cette contrainte avec des trajectoires très différentes.
Dette mondiale : des niveaux historiques
En 2024, les sorties nettes de capitaux des pays en développement ont atteint 205,1 milliards de dollars, portant le déficit cumulé 2022‑2024 à 741 milliards de dollars, le niveau le plus élevé depuis cinquante ans.
La dette extérieure totale des pays à revenu faible et intermédiaire s’élève à 8 900 milliards de dollars, tandis que les pays éligibles aux financements concessionnels de l’Association internationale de développement (IDA) cumulent environ 1 200 milliards de dollars.
Parallèlement, le coût des emprunts a atteint des records depuis plus de vingt ans pour les créanciers publics et dix-sept ans pour les privés, mettant les budgets publics sous pression et limitant les investissements dans les secteurs essentiels.
Algérie : faible dette extérieure mais…
L’Algérie, qui a traversé dans les années 1980 une grave crise du service de la dette, l’entraînant vers un ajustement structurel sous l’égide du FMI, a depuis opté pour une politique de faible endettement extérieur. Grâce aux recettes pétrolières et à l’autofinancement, sa dette extérieure reste très faible (2,87 milliards de dollars, 1,3 % du PIB) et le service de la dette limité. Cependant, la dépendance à la dette intérieure et au financement non conventionnel (2017‑2019) a accru la masse monétaire, absorbé une grande partie de la liquidité bancaire et limité le financement du secteur privé. La croissance hors hydrocarbures reste insuffisante (4,8 %) pour créer les emplois nécessaires.
Maroc : un accès aux marchés à coût élevé
Le Maroc maintient un accès relatif aux marchés internationaux, mais le coût de l’emprunt est historiquement élevé. Sa dette extérieure croît pour financer infrastructures, transition énergétique et programmes sociaux. Le service de la dette absorbe 13 % des recettes d’exportation, réduisant la marge pour les investissements publics. La croissance hors hydrocarbures atteint 3,5 %.
Tunisie : risque d’asphyxie financière
Avec une dette publique de 84,5 % du PIB et un service de la dette mobilisant une grande part des recettes, la Tunisie se trouve dans la situation la plus fragile. L’accès limité aux financements extérieurs et une croissance structurellement faible mettent sous pression les investissements publics et les dépenses sociales, compromettant durablement le développement. La croissance hors hydrocarbures est de 2 %.
Synthèse 2024 – Maghreb
| Pays | Dette extérieure / publique | Service de la dette | Croissance hors hydrocarbures | Particularités |
| Algérie | 2,87 Mds $ (1,3 % PIB) | Faible | 4,8 % | Dépendance à la dette intérieure, financement non conventionnel, héritage de la crise des années 80 |
| Maroc | En progression | 13 % des recettes d’exportation | 3,5 % | Coût élevé de l’emprunt limite les investissements |
| Tunisie | 84,5 % du PIB | Très élevé | 2 % | Accès limité aux financements externes, risque d’asphyxie financière |