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Les blessés du stade 05 juillet souffrent dans le cloisonnement (reportage)

Par Lynda Abbou
27 juin 2025

Une tension palpable règne ce mardi 24 juin 2025, à l’hôpital de Beni Messous, sur les hauteurs d’Alger. Tandis que les agents de sécurité régulent les allées et venues des visiteurs dans les différents pavillons de l’établissement, certains, dépourvus d’autorisation, patientent à l’ombre des arbres d’un petit jardin attenant au parking, cherchant un peu de fraîcheur.

Ils sont jeunes, vêtus de maillots du Mouloudia, club de leur  cœur. Depuis plus d’une heure, ils attendent, anxieux, des nouvelles des trois supporters blessés lors du match tragique au stade du 5-Juillet, hospitalisés ici depuis bientôt quatre jours. L’inquiétude se lit sur leurs visages fermés : obtenir une autorisation d’accès au chevet des blessés relève de l’improbable.

À l’entrée du service où sont pris en charge les victimes, l’accès est sévèrement restreint. Seules les familles les plus proches peuvent entrer. Le couloir, bondé d’infirmières, de familles et d’agents de sécurité, est difficile à traverser. Il est même compliqué de localiser la chambre des blessés. « Ils sont ici, mais vous ne pouvez pas entrer », glisse une infirmière sous couvert d’anonymat à Maghreb Emergent, tout en se voulant rassurante sur leur état.

Ici, la discrétion est de mise. Ni les identités ne sont révélées, ni la curiosité tolérée. Un jeune homme, dans la trentaine, entouré de deux accompagnateurs, se présente comme le coordinateur officieux des visites. Il filtre les accès, fixe les durées, et semble seul maître des lieux. Dans cette atmosphère lourde et anxiogène, une parente excédée laisse éclater son incompréhension : « Je ne comprends rien. Pourquoi tout ce contrôle ? Pourquoi cette tension autour de simples visites ? »

À travers l’interstice des vitres, on aperçoit les trois blessés, allongés, immobiles. Bien qu’ils soient hors de danger immédiat, leurs blessures, localisées au dos, laissent présager des séquelles lourdes. « Ils ne peuvent bouger sans assistance. Ils ont échappé à la mort, mais le dos est gravement atteint », confie une infirmière.

Près de la porte d’entrée, un groupe de jeunes refait le film de cette journée noire du samedi, jour où le Mouloudia devait fêter son sacre dans l’euphorie du stade du 5-Juillet. La fête a viré au drame : des chutes depuis la tribune supérieure ont fait trois morts et 81 blessés. Les images de l’incident, largement relayées, ont bouleversé le pays. Dans les regards des jeunes supporters présents, se mêlent désarroi et silence. Fait étrange : ils ne sont pas nombreux autour de l’établissement. Ont-ils été dissuadés, ou tout simplement écartés par les règles imposées à l’intérieur ?

Mustapha Bacha : silence sur un cas critique

Le black-out ne s’arrête pas aux murs de Beni Messous. À l’hôpital Mustapha Bacha, un autre blessé grave a été admis. Massinissa Hatout, originaire d’Aïn Benian, est plongé dans le coma depuis le jour du drame. Il est hospitalisé dans le service réanimation des urgences chirurgicales, dont l’accès est strictement verrouillé. Les visiteurs trop curieux sont systématiquement redirigés vers d’autres pavillons.

Pourquoi ce verrouillage ? Respect du secret médical ou volonté délibérée d’éviter l’affluence ? « Il est là… mais il n’est pas là », lâche un membre du personnel, l’air amer, pour évoquer la gravité de l’état du jeune homme.

Les proches de Massinissa décrivent une situation critique. Leur colère reste vive face à l’organisation de ce match dans un stade qu’ils jugent vétuste. « Le stade date de l’époque de Boumediene ! », s’emporte un voisin.

À Aïn Benian, l’émotion est grande. Le quartier peine à réaliser le drame vécu par ce jeune, connu pour sa fougue et son amour inconditionnel pour le MCA. Entre prières et espérance, les siens scrutent la moindre nouvelle. Comme tant d’autres, ils n’ont plus d’yeux que pour les hôpitaux, devenus lieux de veille et de chagrin.

La fête annoncée n’aura pas lieu. Le trophée ne sera pas levé. Et c’est dans la froideur des couloirs de Beni Messous et Mustapha Bacha que l’on retiendra que la joie peut être brisée par les négligences les plus cruelles.

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