Les privés algériens préfèrent vendre les voitures, pas les fabriquer | Maghreb Émergent

M A G H R E B

E M E R G E N T

Algérie

Les privés algériens préfèrent vendre les voitures, pas les fabriquer

Par Maghreb Émergent
8 avril 2014
Voiture
Vendre, pour les privés algériens, est moins compliqué et plus rentable

Voiture

Les opérateurs privés rechignent à se lancer dans l’industrie automobile. Ils préfèrent la distribution, moins compliquée et plus rentable.

 

Fabriquer des voitures en Algérie ? Les entreprises privées algériennes hésitent. Des annonces ont été faites, mais rien ne s’est concrétisé jusque-là. Pourtant, l’Algérie dispose d’atouts considérables, dit-on : un marché, des financements, des facilités offertes par le gouvernement, et une volonté d’investir un secteur aux multiples retombées.

Sur le terrain, la réalité est très différente. Les privés ont préféré investir le secteur de la distribution, selon le système des concessionnaires, avec un succès foudroyant. Avec le boom du marché de l’automobile, une centaine de concessionnaires se partagent un chiffre d’affaires de six à huit milliards de dollars, dominé par quelques grandes marques qui se taillent la part du lion.

Quelques timides tentatives ont été ébauchées dans le montage de véhicules, mais elles restent peu significatives. Un économiste, consulté par Maghreb Emergent, estime que le développement de l’activité montage en Algérie bute sur trois écueils. En plus des difficultés liées à tout investissement, l’Algérie s’est lancée dans un démantèlement tarifaire qui ne permet pas à la production locale d’être suffisamment attractive face aux grandes marques internationales, dit-il. En outre, « les entreprises privées algériennes n’ont pas encore la surface nécessaire pour aller vers les grands investissements » nécessaires dans ce secteur. « Il faut qu’elles changent d’échelle, ou qu’elles s’associent avec d’autres partenaires », précise-t-il, ajoutant qu’un « projet d’envergure dans l’automobile exige des mises de départ hors de portée des privés algériens ».

Seuil critique

Un ancien ministre de l’industrie insiste sur ces écueils. A moins d’un seuil critique, proche du demi-million de véhicules produits chaque année, l’investissement dans le montage automobile n’est pas rentable, dit-il. Le projet marocain avec Renault démarre à un seuil de 400.000 véhicules par an, précisément pour en garantir la viabilité. Mais même à ce niveau, la valeur ajoutée est assez modeste, rapportée au volume de l’investissement. « C’est la fabrication de composants qui peut améliorer la valeur ajoutée et le bilan devises » d’une usine de montage, dit-il.

Un ancien cadre de la SNVI note toutefois que la rentabilité du montage n’est pas vitale « si les projets lancés provoquent un effet d’entrainement en amont et en aval ». Selon lui, l’activité montage « peut être supportée par des artifices, comme la commande publique, si cela permet de se développer la production de composants, le développement des services, la recherche et la création d’emplois ».

Un marché cédé sans contrepartie

Les privés algériens n’en sont pas encore là. Ils ont un marché juteux, et ils veulent le garder. Objectivement,  ils n’ont pas intérêt à fabriquer des voitures, une opération très complexe, tant qu’ils ont la possibilité de gagner beaucoup d’argent avec les importations. Ils ont même tendance à freiner toute activité de production locale, car cela remettrait en cause toute l’architecture économique du secteur.

Leur position bénéficie de l’appui de deux alliés de poids, la bureaucratie locale et les fabricants. La bureaucratie est incapable de percevoir l’enjeu que représentent les importations de véhicules. Pourtant, en valeur, les importations algériennes de véhicules représentent deux fois celles des céréales, et quatre fois celles des médicaments. A part la taxe sur les véhicules neufs, aucune mesure n’a été prise pour encourager la production locale.

Les fabricants automobiles n’ont, quant à eux, aucun intérêt à produire en Algérie. Leur modèle de production, fait de discipline et de rigueur, ne peut pas être transposé dans un pays totalement déstructuré et imprévisible. Mais plus grave encore, note un ancien haut responsable, « les firmes étrangères ont pris possession du marché algérien, qui leur a été offert sans contrepartie. Ce sont elles qui le contrôlent aujourd’hui. Ce sont donc elles qui décident ».

 

ARTICLES SIMILAIRES

Actualités Algérie

« La cour constitutionnelle conservatrice sur le code de procédure pénale » (député yagoubi- suite)

2e partie : Lecture constitutionnelle approfondie de la décision n° 02/CC/CS/C/2025 rendue par la Cour constitutionnelle le 16 juillet 2025 concernant la constitutionnalité des articles 78, 187 et 188 du Code de… Lire Plus

Actualités Algérie

La Turquie drague Haftar : un coup d’Ankara au détriment d’Alger ?

Alors que la situation est troublée à l’Ouest, Ankara drague le clan Haftar à l’Est. Au détriment d’Alger ? Tripoli est de nouveau exposée au risque d’un conflit entre milices… Lire Plus

Actualités Algérie

Alger–Paris : la rupture est-elle inévitable ?

La relation entre l’Algérie et la France s’est profondément détériorée, au point que certains analystes envisagent une rupture diplomatique. Le réchauffement entre Paris et Rabat peut-il servir de modèle de… Lire Plus

Actualités Algérie

Chems-Eddine Hafiz, le “dernier canal” entre Alger et Paris ciblé

Le journal Libération a publié, le 9 août, un portrait à charge, haut en couleur, de Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée, présenté comme “le véritable ambassadeur d’Alger” à… Lire Plus

Á la une Actualités

Akram Khrief (directeur du site Menadefense) : L’enquête des Maliens est caduque

Akram Khrief, directeur fondateur de Menadefense (Media spécialisé dans les questions militaires), expose dans cet entretien les raisons pour lesquelles la justice malienne ne peut pas à mener d’enquête sur… Lire Plus