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« Les start-ups en Algérie souffrent d’une absence d’écosystème favorable » (expert)

Par Maghreb Émergent
23 octobre 2019

Le gouvernement Bedoui a promis aux start-ups et aux nouveaux projets des exonérations d’impôts dans le projet de la loi de finances 2020 et des mesures pour faciliter l’accès au foncier. Mesures annoncées par le Premier ministre, le 14 septembre dernier, lors de la manifestation « Algeria INNOV 2019 ».

Les ministres du commerce et de l’intérieur ont également fait la promotion de ces mesures. L’expert en e-marketing et nouvelles technologies,  IhebTekkour, est très sceptique sur l’impact de ses mesures sur le développement des startups, et particulièrement dans l’économie numérique.

Dans un entretien à Maghreb Émergent, il souligne qu’il y a déjà eu le projet, ‘’d’Alger Smart City’’, une ville connectée, lancé en grandes pompes au printemps 2017,  mais qui est resté sans suite.  Il avait pourtant donné lieu à la tenue d’un sommet international les 27 et 28 juin 2018 dédié aux nouvelles technologies et stratégies d’investissement avec la participation de plus de 4000 invités entre maires, ministres, entrepreneurs algériens et étrangers

Le e-commerce et le e-paiement peinent à se développer

L’expert note qu’il a fallu attendre 2018 pour voir promulguée la première loi sur le commerce en ligne ou le e-commerce, alors que les premières initiatives ont vu le jour en 2010. Les acteurs du e-commerce ont été consultés lors de l’élaboration de la loi.

Sur les 55 amendements recensés et acceptés par la commission parlementaire, aucun n’a été pris en compte dans la loi promulguée.  Le e-commerce peine à se développer. Les raisons sont multiples : les banques, la qualité de la connexion 4G, la déficience de l’ARPT, l’inefficacité d’Algérie Télécom.  Pour pouvoir faire du e-commerce, il faut être hébergé en Algérie. Seul le .dz est habilité à recevoir des paiements en ligne. Il faut donc être hébergé par le CERIST. Mais quand on connaît les lenteurs bureaucratiques qui caractérisent cet hébergeur, on comprend pourquoi les opérateurs préfèrent un hébergement dans un pays européen ou même aux USA et sont donc privés de lancer un commerce en ligne.

Autre obstacle, sur les centaines de milliers de commerçants en Algérie, à peine un peu plus de onze milles parmi eux acceptent la carte CIB. Les particuliers disposant d’une carte CIB La Poste, sont toujours exclus du  e-paiement. l’institution postale n’étant pas  dans le réseau du e-paiement. Or, la poste est de fait la plus grande banque du pays du fait du nombre élevé de comptes particuliers, ce qui rend encore plus anormal que sa carte CIB ne serve  qu’aux retraits

Mais, relève  IhebTekkour, ce ne sont pas seulement les  commerçants qui sont rétifs à ce mode de paiement.  Les administrations publiques, comme les Impôts, la CNAS, la CASNOS, le CNRC…n’acceptent pas le paiement par carte CIB. Autre anomalie, on peut réserver en ligne dans des hôtels mais on ne peut pas régler.

Mais que font les banques, publiques et privées, pour inciter leurs clients professionnels à accepter la carte CIB ? Quelles sont les actions de vulgarisation entreprises ? Les banques ont besoin de forces commerciales pour démarcher les professionnels ciblés comme cela s’est fait dans d’autres pays au même niveau de développement et ou ce procédé s’est développé.

Selon IhebTekkour, les start-up rencontrent un autre problème pour développer leurs activités, l’achat d’outils ou d’applications en ligne. Elles doivent disposer d’un mode de paiement électronique. Elles peuvent ouvrir un compte à 50.000 DA et avoir une carte de paiement,  mais elles sont contraintes d’alimenter ce compte par le marché parallèle de la devise.

Ce qu’attendent les start-ups

Des incubateurs publics (USTHB et Sidi Abdellah) et  privés existent, mais les porteurs de projet ont du mal à se développer, faute d’un écosystème favorable. Le développement de projets dans l’économie numérique doit répondre à des besoins exprimés par les futurs acquéreurs de ces produits.

Avec plus de 35 millions d’abonnés ayant accès à internet dont 3 millions à l’internet fixe,  le marché et le potentiel pour le développement de solutions digitales existe. Il faut transformer ce potentiel en plusieurs plans de charge à mettre à la disposition des start-up capables de les transformer en véritables projets innovants.

Tous les problèmes rencontrés par aussi bien les administrations publiques que les entreprises activant dans les secteurs public et privé peuvent être confiés par le biais d’appels d’offres en priorité aux compétences nationales. Les porteurs de projets sont prêts à payer leurs impôts s’ils ont des plans de charge, des bons de commande, synonyme de chiffre d’affaires.

L’exemple des pays africains qui sont en train de réussir leur transition numérique

L’exemple des pays africains, qui avec nettement moins de moyens financiers, ont réussi leur transition numérique et digitale est édifiant et mérite d’être sérieusement étudié. Citons le cas du Nigeria, du Kenya ou Nairobi est devenue le hub numérique d’Afrique de l’est, et l’une des capitales les plus dynamiques dans le domaine de l’innovation sur le continent, aux côtés de Lagos, de Cape Town et de Kigali. Le Kenya dispose d’un véritable écosystème de start-ups : on compte 108 incubateurs dans la seule ville de Nairobi.

 Au Rwanda  les déclarations de naissance ou demandes de permis de construire s’effectuent en ligne au moment ou en Algérie on célèbre le retrait de l’extrait de naissance dans toutes les APC. Plus un seul papier n’encombre la table du Conseil des ministres. Le Rwanda  est sponsor de  Vivatech. Ces pays ont une stratégie claire et visionnaire pour réussir leur transition d’économie de rente vers une économie basée sur le développement des connaissances et de l’économie intelligente. Au même moment, en Algérie le caractère d’économie rentière est réaffirmé à travers la priorité donnée, par un gouvernement intérimaire censé gérer les affaires courantes, à la loi sur les hydrocarbures pour attirer de nouveaux investisseurs. Les prévisions de développement des énergies fossiles, conventionnelles ou non conventionnelles, sont moroses. Les moyens, même limités, doivent être investis dans l’économie de la connaissance ou dans d’autres secteurs dans lesquels l’Algérie a des avantages comparatifs évidents (Tourisme, agriculture, énergies nouvelles…). Ce sont ces choix stratégiques qui assureront la préparation d’un écosystème favorable à l’innovation et à la transition vers l’économie de demain.

Abdenour Haouati

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