Bruxelles et Rabat doivent parapher, le 4 octobre, un nouvel accord commercial élargi aux territoires du Sahara occidental. Une initiative soutenue par Copenhague mais qui heurte la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et alimente de vives réserves parmi les juristes.
Révélée par le média d’investigation Danwatch, une note confidentielle du ministère danois des affaires étrangères atteste que l’Union européenne et le Maroc s’apprêtent à conclure, le 4 octobre, un nouvel accord commercial. Le texte, qui englobe les territoires du Sahara occidental, relance les interrogations sur sa conformité au droit européen
Selon le document, Copenhague a d’ores et déjà annoncé son soutien. Le ministre danois des affaires étrangères, Lars Løkke Rasmussen, a indiqué devant la Commission des affaires européennes que son gouvernement voterait en faveur du projet, malgré les doutes exprimés par plusieurs juristes. Ceux-ci rappellent que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait annulé en 2024 un précédent accord, jugeant que le Sahara constitue un « territoire distinct et non autonome ».
Inspirée de la mouture de 2019, la nouvelle version prévoit l’importation de produits issus du Sahara avec les mêmes préférences tarifaires que ceux du Maroc, sous supervision douanière marocaine. Le texte met en avant un objectif de « développement durable » au bénéfice du Sahara occidental, mais, selon plusieurs experts cités par Danwatch, les garanties de participation des Sahraouis à la gestion de leurs ressources demeurent limitées.
Vers un compromis fragile à Bruxelles
Cette relance s’articule aussi avec les discussions engagées par la Commission européenne sur un retour de l’accord de pêche, suspendu fin 2024 après une décision de la CJUE. D’après Euractiv, Bruxelles envisage un compromis : autoriser les exportations sahariennes sous un étiquetage « Sahara occidental », tout en les intégrant au régime douanier marocain. Les certificats d’origine resteraient toutefois délivrés par Rabat, reflet d’une volonté de préserver sa souveraineté.
Rabat, de son côté, refuse toute distinction entre le Sahara et le reste de son territoire. Pour les autorités marocaines, un accord avec l’Union ne peut avoir de sens que s’il s’applique à l’ensemble du pays. Cette position pèse d’autant plus sur Bruxelles que la suspension de l’accord de pêche a d’abord affecté ses propres intérêts, l’Union restant fortement tributaire des exportations agricoles et halieutiques en provenance du Maroc, relève Agence Europe.
Parallèlement, d’autres partenaires, dont la Russie, renforcent leurs liens avec Rabat, tandis que le soutien américain à la souveraineté marocaine sur le Sahara se réaffirme et que les investissements internationaux affluent dans le Sahara occidental.
Dans ce contexte, le Maroc apparaît en position de force. L’Union européenne se retrouve contrainte de composer avec l’exigence de sa propre Cour de justice, tout en cherchant à préserver des échanges agricoles et halieutiques devenus essentiels avec son partenaire du sud de la Méditerranée.