Les prix des matières premières devraient chuter de 12 % cette année puis de 5 % en 2026, atteignant leur plus bas niveau depuis 2020, selon le dernier rapport de la Banque mondiale. Cette correction, qui touche l’énergie, l’alimentaire et les métaux, met fin au cycle haussier post-pandémie et place les économies émergentes exportatrices face à des défis budgétaires inédits.
Le dernier rapport « Commodity Markets Outlook » de la Banque mondiale, publié fin avril 2025, dessine un paysage contrasté pour les marchés mondiaux des matières premières. Après plusieurs années de forte hausse alimentée par la reprise post-pandémie et les tensions géopolitiques, les prix entrent désormais dans une phase de correction significative. Cette évolution, qui touche l’ensemble des secteurs de l’énergie aux produits alimentaires, redéfinit les équilibres économiques mondiaux et pose des défis particuliers aux économies émergentes fortement dépendantes de ces exportations.
La correction s’annonce durable. Les analystes de l’institution financière internationale prévoient une chute des prix de 12 % en 2025, suivie d’une baisse supplémentaire de 5 % en 2026. Cette trajectoire descendante ramènerait les cours à leur niveau le plus bas depuis 2020, marquant ainsi la fin du cycle haussier exceptionnel qui avait caractérisé la période 2021-2023. Ajustés à l’inflation, ces prix passeraient pour la première fois depuis la pandémie sous la moyenne de la période 2015-2019, témoignant d’un retour à des fondamentaux plus traditionnels.
L’énergie au cœur de la correction
Le secteur énergétique concentre les plus fortes baisses attendues. Le rapport anticipe une chute de 17 % des prix de l’énergie en 2025, puis de 6 % supplémentaires l’année suivante. Le pétrole Brent, référence mondiale, devrait s’établir à 64 dollars le baril en 2025 contre 81 dollars en 2024, avant de poursuivre son repli à 60 dollars en 2026. Cette évolution s’explique par un déséquilibre structurel entre l’offre et la demande : « L’offre mondiale devrait dépasser la demande d’environ 0,7 à 1,2 million de barils par jour en 2025 », précise le document de la Banque mondiale.
Les autres segments de matières premières suivent cette dynamique baissière, mais avec des intensités variables. Les prix alimentaires mondiaux devraient reculer de 7 % en 2025 puis de 1 % en 2026, une évolution portée par la forte production céréalière mondiale. Le riz connaît une correction particulièrement marquée avec une baisse attendue de 29 %, soutenue par l’abondante production indienne. Les métaux industriels subissent également cette pression déflationniste, pénalisés par la crise immobilière chinoise et les tensions commerciales mondiales qui affaiblissent la demande.
Des conséquences asymétriques pour les économies émergentes
Cette correction généralisée des prix place les économies en développement dans une position délicate. Deux tiers d’entre elles exportent des matières premières et avaient bénéficié de la hausse exceptionnelle des cours post-pandémie pour consolider leurs finances publiques et leurs réserves de change. La combinaison actuelle de prix bas et de volatilité historiquement élevée menace désormais ces acquis. « La combinaison d’une forte volatilité et de prix bas est source de difficultés », analyse Indermit Gill, économiste en chef de la Banque mondiale.
Face à ces défis, l’institution recommande une stratégie d’adaptation en trois volets. Les pays exportateurs doivent d’abord « rétablir la discipline budgétaire » pour compenser la baisse des recettes d’exportation. Ils doivent ensuite « créer un environnement plus favorable aux entreprises pour attirer les capitaux privés », diversifiant ainsi leurs sources de financement. Enfin, ils sont appelés à « libéraliser le commerce chaque fois que possible » pour renforcer leur résilience face aux chocs externes.