L’annonce du retour de Kamel Rezig au ministère du Commerce extérieur n’a pas manqué de susciter des réactions, notamment sur les réseaux sociaux. Depuis l’annonce de sa re-nomination, hier lundi 14 avril, par la présidence de la république, les internautes rivalisaient de commentaires sur ce retour inattendu d’un homme dont le premier passage n’a pas laissé de bons souvenirs.
Du côté du citoyen ordinaire, le nom de Kamel Rezig, à la tête du ministère du Commerce, est lié à plusieurs crises de distribution de produits alimentaires, notamment le lait subventionné. C’est la période ayant vu plusieurs commerçants condamnés à de lourdes peines de prison pour les chefs d’accusations de « spéculation » et « de complot contre la stabilité de l’État… »
Politiquement, l’ancien ministre du Commerce (et nouveau ministre du Commerce extérieur et de la promotion des exportations) est réputé pour son caractère conservateur, avec des décisions « peu orthodoxes » où parfois l’étonnement le dispute au cocasse. Il avait ainsi marqué la scène médiatique par ses vidéos dans les mosquées de Boufarik (sa ville natale), diffusées sur les réseaux sociaux, l’imposition d’un certificat « Halal » pour les produits alimentaires importés ou encore, la plus emblématique, la chasse contre « les articles scolaires multicolores », dont il considérait qu’ils sont conçus pour diffuser la culture LGBT dans la société ».
Pour les économistes, Kamel Rezig est loin d’être l’homme de la situation, particulièrement au ministère du Commerce, même s’il peut se prévaloir du grade de professeur d’économie. Tout le monde garde en mémoire son altercation avec un député en plein hémicycle en 2023. Aussi, le président Teboune lui-même l’avait ouvertement désavoué en critiquant son bilan et en jugeant « les pénuries alimentaires inacceptables ». Limogé en mars 2023., il est nommé, un mois plus tard, après, en qualité de conseiller du président, chargé des questions économiques. Une voie de garage, pour les observateurs, même si son atterrissage à la présidence pouvait légitimement apparaître comme une marque de confiance.
Les raisons du maintien de Rezig
Ce retour en grâce peut prêter dès lors à beaucoup d’interrogations. Mais, pour comprendre les raisons du maintien de Kamel Rezig, malgré les controverses qu’il a suscitées, il est nécessaire de revenir à l’évolution du secteur du commerce extérieur durant ces dernières années. Nous sommes en 2015, année où le prix du Brent a chuté au-dessous de 40 dollars. Face à la perspective de compression des ressources, le gouvernement algérien décide des mesures de réduction des importations. Le décret exécutif « No 15 306 » du 06 décembre 2015 institue le régime de licence d’importation tel que prévu par l’ordonnance « 03 04 » du 19 juillet 2003. « Des licences d’importation ou d’exportation de produits peuvent être instituées pour administrer toute mesure prise en vertu des dispositions de la présente ordonnance ou des accords internationaux auxquels l’Algérie est partie », stipule l’art. 6 de cette ordonnance.
À son arrivée en 2020, Kamel Rezig annonce une opération visant à assainir la liste des importateurs , ce qui a permis de réduire le nombre d’opérateurs dans ce secteur, passant de 45 000 à 15 000. Il affiche également son intention de ramener ce chiffre à 9 000 après avoir identifié 6 000 importateurs fictifs.
Un décret exécutif datant de mai 2022 vient compléter celui de 2015 en introduisant un article 4-bis et un article 4-ter qui précisent: « les secteurs ministériels concernés par l’octroi des licences sont tenus de demander l’avis préalable du ministre chargé du Commerce, avant la délivrance de la licence… ».
Mais, dès le mois d’avril 2022, les opérateurs activant dans le domaine de l’importation pour la revente en l’état sont invités à « introduire une demande via la plateforme électronique du ministère pour obtenir un document remis par les services de l’Agence nationale de la promotion du commerce extérieur (ALGEX), à joindre au dossier de demande de domiciliation bancaire, afin de parachever les procédures d’importation ».
2023, Tayeb Zitouni, le successeur de Rezig au ministère du Commerce, annonce pour sa part la révision de la plateforme de l’Agence nationale de promotion du commerce extérieur (ALGEX) dédiée aux importateurs « en vue de renforcer son efficacité dans la régulation des importations ».
Mais, dimanche dernier, le président Abdelmadjid Tebboune, lors de la rencontre des opérateurs économiques, annonce la fin d’ALgex, une agence crée en 2004, devenue avec le temps un instrument d’administration de l’activité de l’import-export. Argument avancé: «soutenir le développement des exportations hors hydrocarbures »
M. Iouanoughene