Le président Abdelmadjid Tebboune a lancé, lors de son dernier entretien télévisé, un ultimatum inattendu à son gouvernement : il prendra des mesures radicales si le projet de numérisation de l’ensemble des secteurs n’aboutit pas d’ici la fin du mois de décembre 2025.
Face aux représentants des médias, le chef de l’État a dénoncé la « résistance à la transparence » de certains cercles administratifs, qu’il a comparés à des « chauves-souris qui aiment travailler dans l’ombre ». Selon lui, une administration intègre n’a rien à craindre de la digitalisation. Il a regretté l’absence persistante de données fiables et l’opacité dans la gestion de secteurs sensibles comme l’agriculture ou le foncier. Cet avertissement laisse présager l’introduction prochaine de nouvelles mesures dans la loi de finances 2026, actuellement en préparation par le gouvernement.
Trois avancées déjà mises en place
Si l’Algérie accuse encore un retard significatif en matière de transformation numérique, plusieurs initiatives concrètes ont néanmoins été déployées ces dernières années, notamment au sein du ministère de l’Intérieur ou de celui de la Justice.
Parmi elles, la digitalisation de plus de 25 millions de documents administratifs, qui facilite désormais la délivrance des actes d’état civil. On peut également citer l’instauration de plateformes en ligne pour le paiement des taxes et la gestion foncière. Toutefois, les observateurs soulignent l’absence d’interconnexion entre les établissements publics, un retard que le président a justifié par la mise en place encore inachevée d’un grand datacenter national.
D’autres chantiers existent, tels que la modernisation des systèmes d’inscription universitaire et de formation professionnelle, ou encore le développement de guichets électroniques. Mais leur application demeure inégale selon les secteurs et les régions.
Retards structurels et résistances internes
Malgré une multiplication d’annonces depuis 2020 et la création d’un ministère dédié à la Numérisation, experts et analystes relèvent une lenteur chronique dans la mise en œuvre effective de la digitalisation. Les causes sont connues : infrastructures numériques insuffisantes, bureaucratie persistante, résistances au changement et absence de culture numérique dans l’administration.
Sans préciser la nature des « mesures radicales » envisagées pour décembre, le président Tebboune semble vouloir provoquer un électrochoc. Cet ultimatum s’apparente à une dernière mise en garde pour accélérer un chantier essentiel à l’efficacité de l’action publique. Car pour l’Algérie, rattraper ce retard n’est plus un choix mais une nécessité, afin de répondre aux aspirations d’une population jeune, massivement connectée, mais encore trop souvent confrontée à des services publics loin des standards internationaux.