Chaque année, le continent africain perd des centaines de milliards de dollars à cause de pratiques financières opaques. L’Algérie se trouve parmi les pays africains les moins bien notés en la matière. C’est ce que révèle la dernière édition de l’Indice d’opacité financière mondiale, publiée le 3 juin 2025 par l’ONG britannique Tax Justice Network.
Contrairement aux classements traditionnels de corruption, cet indice évalue la facilité de réaliser des transactions financières cachées et l’ampleur des services financiers utilisés pour ces pratiques. L’Algérie, bien que ses services financiers soient modestes (336,5 millions de dollars), manque cruellement de mécanismes efficaces pour garantir la transparence. Conséquence : elle se classe au 33e rang mondial de l’indice, ce qui la positionne comme la moins performante parmi les pays africains analysés.
L’Afrique face aux flux financiers illicites : Un rôle limité mais des pertes colossales
De manière générale, les pays africains jouent un rôle relativement limité dans l’opacité financière mondiale. Le gros du problème provient plutôt des grandes puissances économiques. Cependant, les pertes subies par l’Afrique restent astronomiques. Kevin Chika Urama, économiste en chef de la BAD, cité par l’agence Ecofin a rappelé que le continent perd jusqu’à 513 milliards de dollars chaque année à cause de ces flux financiers opaques.
Alors que l’Algérie doit améliorer sa transparence, d’autres nations africaines montrent la voie. Le Botswana, par exemple, est salué pour ses efforts. Il se classe premier en Afrique et 11e au niveau mondial, démontrant sa capacité à limiter les abus financiers tout en développant un secteur financier sain. Le Rwanda (118e mondial) et la Gambie (117e mondial) suivent également de près. Le Ghana, bien que doté de bonnes lois, voit sa position impactée par le volume de ses services financiers internationaux (1,34 milliard de dollars).
Les véritables bastions de l’opacité financière
L’indice pointe du doigt les véritables facilitateurs de ces flux opaques. Les États-Unis, le Royaume-Uni, le Luxembourg, Singapour et l’Allemagne figurent en tête de liste. La Suisse, Hong-Kong, la France et l’Irlande du Nord suivent de près. Ces pays, tout en renforçant la transparence en interne, se montrent moins stricts face aux capitaux illicites provenant d’autres régions du monde, notamment de l’Afrique.
Moran Hariri, directrice adjointe de Tax Justice Network, dénonce cette hypocrisie : « Les règles sont appliquées à domicile, mais contournées à l’étranger. Les pays de l’UE répriment la fraude fiscale chez eux tout en fermant les yeux lorsqu’elle vient d’ailleurs. » L’indice critique sévèrement les États-Unis, accusés d’avoir bloqué les réformes visant à une coopération fiscale mondiale plus juste. Alex Cobham, directeur de Tax Justice Network, affirme : « La démocratie américaine est capturée par les milliardaires, les fraudeurs fiscaux et les blanchisseurs d’argent. »
Vers une plus grande transparence pour protéger des pays comme l’Algérie
L’Indice d’opacité financière, mis à jour tous les deux ans, évalue les pays sur 20 indicateurs clés, incluant la transparence des entreprises, la régulation fiscale et financière, et la coopération internationale. En mettant en lumière ces zones grises, l’indice vise à encourager les réformes nécessaires pour protéger les pays vulnérables, dont l’Algérie, contre la fuite massive de leurs ressources. L’objectif est clair : garantir une plus grande justice financière mondiale.