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Pétrole – La réunion de l’OPEP à Alger redonne des couleurs à un marché durablement incertain

Par Yacine Temlali
29 septembre 2016
Photo : APS.

Lors de sa réunion, hier, à Alger, l’OPEP a aplani le terrain pour un prochain accord sur un gel de la production, ce qui est suffisant pour redonner des cours à un marché amorphe. Elle n’a, toutefois, pas fixé de baisse précise de la production : celle-ci, estimée à 33.2 millions de barils/jour, devrait être ramenée entre 32.5 et 33 millions. A ce rythme, il faudrait de longs mois pour rééquilibrer le marché, en raison du surplus de l’offre.

 

 

Une véritable euphorie s’est emparée des officiels algériens et d’une grande partie de la presse au lendemain de l’accord de l’OPEP, conclu hier à Alger, sur un prochain plafonnement de la production de pétrole. Ministres, analystes et éditorialistes proches du gouvernement ne tarissent pas d’éloges sur ce « coup de maître » qui aurait abouti à un « accord historique », selon les propos du ministre de l’Energie, M. Bouterfa.

Cet optimisme semblait d’autant plus justifié que le baril de pétrole bondissait aussitôt après l’annonce de l’accord, gagnant près de 5%. Le Brent a même frôlé les 50 dollars dans la nuit de mercredi à jeudi, avec une pointe à 49.38 dollars peu avant minuit GMT, avant de revenir à 48.70 dollars en milieu de matinée de jeudi.

Mais dès jeudi, le réalisme reprenait le dessus. La réunion d’Alger n’a pas donné lieu à un véritable accord, elle a plutôt aplani le terrain pour aller à un possible accord qui serait entériné par une réunion ministérielle de l’OPEP en novembre prochain. C’est un pas important, mais il reste beaucoup de chemin à faire pour parvenir à un accord définitif qui stabiliserait le prix du pétrole autour de 60 dollars.

 

Intérêts iraniens…

 

L’Iran ne voulait pas d’un accord tout de suite pour geler la production. Téhéran veut se rapprocher de son objectif de quatre millions de barils avant d’accepter un éventuel gel de la production.

L’Iran a accepté de signer un accord très contraignant avec les pays occidentaux sur le nucléaire, pour pouvoir, entre autres, exploiter à plein régime ses capacités pétrolières, alors que depuis deux décennies, il ne produisait que la moitié de ce qu’il pouvait produire. Ce n’est pas au moment où il est si près du but, avec près 3.5 millions de barils/jour, qu’il allait céder. Ce qui n’a pas empêché la presse algérienne de s’en prendre à l’Iran le jour même de la réunion d’Alger, l’accusant de constituer le principal frein à un éventuel accord.

D’autres pays voulaient bénéficier d’une sorte de dérogation, car ils sont loin de leurs capacités : Libye, Nigeria et Irak, entre autres. En raison de troubles internes, la production de ces pays reste instable. Ils ne peuvent tenir un engagement précis.

 

Fondamentaux saoudiens…

 

Curieusement, la presse algérienne a plutôt épargné l’Arabie Saoudite, cible privilégiée traditionnelle en de pareilles circonstances. Le rôle de Ryadh était central dans toute tentative d’accord. Il fallait donc le ménager.

Mais si l’Arabie Saoudite a au final accepté de faire un geste, elle n’a pas pour autant abandonné ses propres « fondamentaux ». Elle a pris une décision qui ménage ses intérêts, résumés en six points :

– ne pas pousser les prix à un seuil qui encourage les alternatives au pétrole ;

– maintenir les prix dans une fourchette qui évite une hausse trop forte de la production d’hydrocarbures de schiste ;

– préserver ses parts de marché ;

– se donner la possibilité de reprendre la main à tout moment ;

– maintenir l’arme du pétrole pour préserver sa stature de puissance régionale face à l’Iran ;

– favoriser le très ambitieux plan de transformation économique qui devrait réduire la dépendance du pays envers les hydrocarbures.

 

Et menace du pétrole de schiste américain…

 

Les Saoudiens doivent ainsi tenir compte de cette grande nouveauté : ce n’est plus l’OPEP qui assure le rôle d’équilibrer le marché mais le pétrole de schiste américain. Plus les prix augmentent, plus le pétrole de schiste, réputé plus coûteux, envahit le marché. Il faut donc maintenir le prix suffisamment bas pour éliminer une grande partie du pétrole de schiste. Sinon, le marché est inondé, et les prix s’écroulent.

Rien ne sert non plus de diminuer la production si d’autres acteurs non OPEP, nombreux, prennent aussitôt le relais.

 

Impossible d’assécher rapidement le marché

 

Par ailleurs, la réunion de l’OPEP n’a pas fixé de baisse précise de la production. Celle-ci, estimée à 33.2 millions de barils/jour, devrait être ramenée entre 32.5 et 33 millions. Cela laisse de la marge.

A ce rythme, il faudrait de longs mois pour rééquilibrer le marché, en raison du surplus de l’offre. Mais le marché reste vulnérable à de nombreux facteurs : il suffirait d’un hiver rude, d’un incident ou d’une grève de quelques jours sur un champ important pour que la situation évolue rapidement. Il suffirait également que la Russie agisse de concert avec l’OPEP pour assister à un retournement total du marché, qui partirait alors de nouveau dans un autre cycle de hausse des prix, hausse des investissements, boom du pétrole de schiste, guerre des prix, effondrement du marché, etc.

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