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Économie

Pour l’économie britannique, le mur du « Brexit » se rapproche (décryptage)

Par Yacine Temlali 9 mars 2017
La Première ministre britannique Theresa May (photo : Reuters).

De premiers signes de fragilité qui apparaissent. C’est l’autre face de l’économie britannique et il y a une grande chance que l’euphorie soit de courte durée, au moins pour les ménages britanniques. En douze petites semaines, le rythme de l’inflation a déjà doublé, passant de 0,7 à 1,4%.

 

 

Il faut regarder les deux faces de l’économie britannique. Côté face, oui, la résistance, la résilience de l’économie britannique paraît incroyable. Nos voisins nous rappellent qu’il ne faut décidément jamais les sous-estimer : mercredi 8 mars, le ministre des Finances qui présentait son budget au parlement a annoncé trois bonnes nouvelles pour les Britanniques.

1. Les rentrées fiscales sont supérieures aux prévisions, tout simplement parce que l’économie britannique a tourné plus vite qu’on ne l’avait imaginé. Elle est même « booming », comme on dit outre-Manche. Du coup, nos voisins vont se payer le luxe, avant de quitter l’Union, d’en respecter l’un des critères majeurs, avec un déficit public sous la barre des 3%, au lieu des 3,4% prévus par le gouvernement lui-même. C’est une incroyable ironie.

2. Le gouvernement a donc annoncé qu’il s’était ainsi constitué une cagnotte, de 10 milliards de livres, on ne va pas y toucher, mais on va se la mettre de coté, en cas de besoin, pour accompagner, selon le propre mot du ministre, ‘ce grand voyage » que constitue la sortie de l’Union européenne.

3. Vous vous souvenez que tous les experts annonçaient une récession, un effondrement de l’économie britannique, au lendemain du Brexit, et bien nouveau pied-de-nez, la croissance devrait atteindre 2% sur le prochain exercice, de mars 2017 à mars 2018. Ce qui serait l’une des meilleures performances européennes, en tout cas mieux que l’Allemagne et mieux que la France. Soyons honnête, c’est assez stupéfiant.

 

Le gouvernement maintient sa politique d’austérité

 

Cette situation peut s’expliquer parce qu’il n’y a pas eu de panique, mais une très grande responsabilité des acteurs, dans un pays, l’histoire l’a prouvé, où le mental est une religion. Le consommateur british a été jusqu’à présent à la hauteur de sa réputation, confiant et flegmatique. Il a consommé, sans se laisser abattre par l’adversité ou l’immense incertitude des temps présents. Presque tous les secteurs ont tenus bons. Et cela est tellement vrai que le gouvernement conservateur ne prévoit toujours pas de relâcher la pression budgétaire, surtout si la croissance est encore au rendez-vous. Non, la politique d’austérité sera maintenue, parce que le ministre veut « être certain qu’il y a assez d’essence dans le réservoir » pour tenir pendant la période de transition, ce passage vers l’inconnu qu’est le Brexit.

 

L’inflation frappe les produits de première nécessité

 

Pourtant de premiers signes de fragilité qui apparaissent. C’est l’autre face de l’économie britannique et il y a une grande chance que l’euphorie soit de courte durée, au moins pour les ménages britanniques. Pour le comprendre, il faut lire l’excellent papier publié mercredi par nos confrères du Guardian : l’inflation est de retour dans l’économie britannique [article en anglais] et même assez violemment. En douze petites semaines, le rythme de l’inflation a déjà doublé, passant de 0,7 à 1,4%. Le prix du beurre a ainsi augmenté de 15%, le poisson + 8%, le thé – dont nos amis britanniques font une consommation industrielle – + 6% ! Le prix des fruits a également bondi, comme presque tous les produits de première nécessité.

C’est un coup de massue pour les consommateurs britanniques. Pour une raison simple, que devraient méditer aussi tout ceux qui rêvent de sortir la France de l’Union européenne et de la zone euro : l’effondrement de la livre britannique depuis le référendum se diffuse maintenant dans l’économie réelle, les prix de tous les produits importés ont augmenté mécaniquement, de plus de 15%, et la répercussion est désormais sensible dans nombre secteurs de l’économie. Et il est probable que la chute de la livre se poursuive au fur et à mesure que la réalité du Brexit s’imposera.

Les experts de l’OCDE l’ont souligné dans leur rapport cette semaine, cette dévaluation de la monnaie a appauvri de fait tous les ménages britanniques. C’est maintenant que l’épreuve de vérité va vraiment commencer.

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