L’affaire de corruption de Sonatrach et la compagnie italienne Saipem n’a pas encore livré tous ses secrets. Cet épineux dossier refait surface, vendredi 19 juin, via le tribunal de Milan, qui a fait appel de la décision d’acquittement du groupe énergétique Saipem.
Le 15 janvier dernier, Saipem et ses dirigeants ont été acquittés par la Cour d’appel de Milan, des accusations de pots-de-vin versés pour des contrats obtenus en Algérie. Dans ce même procès, la même Cour d’appel a relaxé les proches de l’ex ministre de l’Energie, Chakib Khalil. Il s’agit de Farid Nourredine Bedjaoui, puissant homme d’affaires et ses deux associés, Samyr Ouraïed et Omar Habour.
Bedjaoui, l’homme de confiance de l’ex ministre de l’Energie en fuite à l’étranger, avait écopé d’une peine de cinq (05) ans et cinq (05) mois de prison en première instance, avant d’être acquitté en janvier dernier. Il est accusé d’avoir indûment perçu 197,9 millions d’euros de commissions de la part de Saipem, filiale du géant pétrolier ENI, dans l’obtention en un temps record, sept contrats entre 2007 et 2009 auprès du groupe Sonatrach, d’une valeur de 8 milliards d’euros.
Il lui est également reproché d’avoir versé des commissions à ses deux associés, Samyr Ouraied et Omar Habour, qui ont été condamnés par contumace à quatre ans et quatre mois de prison, avant qu’ils soient eux aussi acquittés. Ils sont soupçonnés d’avoir blanchi une partie des 197,9 millions d’euros de pots-de-vin, versés par Saipem.
La justice algérienne toujours muette
Par contre, l’ex-ministre de l’Energie Chakib Khelil n’a pas été inculpé dans ce dossier par la Cour de Milan. Ceci, malgré que la justice algérienne le soupçonne d’avoir une étroite responsabilité dans de vastes affaires de corruption, en tant que premier responsable du secteur de l’Energie à l’époque.
En 2013, la justice algérienne avait lancé un mandat d’arrêt international contre lui dans le cadre d’une enquête sur le versement de commissions par une filiale de la compagnie italienne ENI pour l’obtention de contrats en Algérie.
Mais le puissant ancien ministre de l’Energie, très proche de l’ex-président Bouteflika, était bien protégé. La justice algérienne n’a jamais pu l’auditionner, ni dans l’affaire Sonatrach I ni dans l’affaire Sonatrach II.
À l’ouverture du procès de Milan en Italie, pays où l’affaire Sonatrach II a éclaté, Chakib Khelil était cité dans le dossier Saipem, avec des révélations fracassantes. Lors de ce long procès, le procureur général du tribunal de Milan, a affirmé «détenir des preuves» sur le paiement des «pots-de-vin» par la société italienne Saipem en «contrepartie» de «faveurs du ministre algérien de l’Energie et des Mines», Chakib Khelil.
Pour échapper à la justice, Chakib Khelil s’était réfugié aux Etats-Unis et n’était rentré en Algérie qu’en 2016, après l’abandon de poursuites à son encontre.
Mais après la chute du régime Bouteflika, et l’opération « main propre » lancée par le défunt Gaid Salah, la Cour suprême a annoncé avoir reçu deux dossiers de poursuites contre Chakib Khelil.
Ainsi, en avril dernier, cette même Cour a convoqué Khalil pour l’auditionner dans le cadre du réexamen annoncé de l’affaire Sonatrach I et II.
Mais l’ancien ministre de l’Energie n’a pas répondu à la convocation, ce qui a poussé la justice algérienne à lancer un mandat d’arrêt international contre l’insaisissable Chakib Khelil.
Aujourd’hui, après que le tribunal de Milan a fait appel de l’acquittement du groupe Saipem dans cette affaire de corruption, il serait légitime de se demander si Khelil sera enfin rattrapé par ces nombreuses frasques judiciaires ? « affaire » à suivre !