M A G H R E B

E M E R G E N T

Banque

Quand les Banques centrales échouent à doper l’inflation [Le BLOG ECO]

Par Yazid Ferhat 4 novembre 2017

A quoi sert une Banque centrale ? Ou plutôt, à quoi servent deux des plus grandes Banques centrales du monde, à savoir la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) ?

 

Officiellement, les deux sont chargées de mener une politique monétaire indépendante des gouvernements américain et européens. Par politique monétaire (attention aux faux amis), on entend la gestion des taux d’intérêts (et non pas celle des taux de change) afin d’influer sur l’évolution de l’économie, plus exactement de la croissance du produit intérieur brut (PIB).

 

Inflation et emploi

 

La Fed comme la BCE ont pour objectif commun de limiter l’inflation à un objectif fixe (2% pour ces deux institutions monétaires). On peut dire que cela n’est pas nouveau, la lutte contre le dérapage des prix étant, depuis le milieu du vingtième siècle, la mission principale des Banques centrales. Mais la nouveauté, c’est que l’on est dans une configuration où l’inflation est inférieure à cet objectif (1,5% en moyenne pour les Etats-Unis et la zone euro). On connaît les dégâts infligés par une inflation trop forte mais on ignore souvent ceux qu’induit une quasi-déflation. A terme, c’est la vigueur de l’économie qui est mise en danger. En théorie, donc, la Fed et la BCE sont censées œuvrer pour que l’inflation regagne un niveau proche de 2% (des salaires et des prix qui augmentent, c’est la garantie d’un dynamisme économique, du moins en théorie).

Aux Etats-Unis, la tâche est compliquée pour la Banque centrale car sa seconde mission est aussi de maintenir un haut niveau d’emploi. Autrement dit, la Fed doit à la fois agir sur l’inflation mais aussi sur la croissance (censée avoir un effet direct sur les créations d’emplois). On connaît la stratégie suivie depuis quelques années : des taux d’intérêts faibles (via une politique monétaire accommodante) sont censés pousser les entreprises à emprunter pour investir et donc, in fine, à recruter. Or, cette approche produit des effets secondaires plutôt préoccupants. Ainsi, l’argent « bon marché » obtenu grâce aux taux faibles alimente des bulles spéculatives. La Bourse américaine vole de records en records (ce qui permet à l’administration Trump d’affirmer que les marchés valident sa politique) et l’immobilier continue à tutoyer les cimes. La Fed en est consciente. Elle a enclenché un processus de hausse de ses taux directeurs (une nouvelle appréciation devrait avoir lieu en décembre prochain). Cela, alors que l’inflation demeure toujours faible.

 

Approche non orthodoxe

 

En Europe, la BCE n’a que faire de l’emploi (cela lui est souvent reproché) et elle concentre ses efforts sur l’inflation et la stabilité monétaire de la zone euro. Comme aux Etats-Unis, l’institution monétaire s’est engagée dans un plan de rachat continu d’actifs sur le marché obligataire. Appelée « Qantitative Easing » (QE), cette approche non orthodoxe (en théorie, une Banque centrale n’a pas à intervenir sur les marchés obligataires) est destinée à maintenir un niveau élevé de liquidités. De mars 2016 à avril 2017, la BCE a injecté 80 milliards d’euros par mois pour acheter ces actifs (elle a déjà déboursé plus de 2.500 milliards d’euros ce jour). La Banque centrale vient de décider de ramener ces interventions à 30 milliards d’euros à partir de janvier 2018. Là aussi, l’institution n’a pas atteint ses objectifs en matière d’inflation mais elle se targue d’une meilleure santé de l’économie et avance cet argument pour justifier l’allègement du QE.

En réalité, la BCE, comme la Fed aux Etats-Unis, réalise qu’il est temps de limiter l’expansion des bulles spéculatives qui sont apparues dans le sillage des politiques monétaires accommodantes destinées à lutter contre les effets de la crise de 2008. Un acte préventif destiné à éviter un nouveau choc (on ne sait pas encore ce qui se passera quand BCE et Fed vont alléger leurs portefeuilles de ces actifs acquis au cours des dernières années). Productrices de bulles spéculatives, la BCE et la Fed semblent avoir renoncé, même si elles s’en défendent, à atteindre leur objectif d’une inflation à 2%.

ARTICLES SIMILAIRES

Actualités Banque

Banques africaines : la BEA et la BNA parmi les 15 premières du continent

Deux banques publiques algériennes figurent désormais parmi les poids lourds du continent. La BEA et la BNA intègrent le Top 15 du classement 2025 des plus grandes banques africaines établi… Lire Plus

finance islamique
Actualités Banque

Finance islamique : un marché à 6 000 milliards $ où l’Algérie veut sa part

La finance islamique poursuit sa montée en puissance. Selon le Islamic Finance Development Report 2025, publié conjointement par l’ICD (Société islamique pour le développement du secteur privé, filiale du groupe… Lire Plus

Actualités Banque

À Washington, la Banque d’Algérie alerte sur la vulnérabilité des exportateurs d’hydrocarbures

Lorsque le gouverneur de la Banque d’Algérie alerte, à Washington, sur la vulnérabilité des pays exportateurs de la région MENA, c’est implicitement le cas algérien qu’il met en miroir. En… Lire Plus

Algérie Assurances

La BNA ouvre ses guichets aux assurances de la SAA

Un nouveau modèle de distribution des produits d’assurance prend forme dans le réseau bancaire algérien. La Société nationale d’assurance (SAA) et la Banque nationale d’Algérie (BNA) ont officialisé, dimanche, le… Lire Plus

Banque Finances

Banques : six entreprises sur sept restent exclues du crédit, selon Finabi

Le cabinet estime que seules 13 % des entreprises et des ménages ont accès au crédit, un déficit structurel qui révèle la déconnexion entre le système financier et l’économie réelle…. Lire Plus