Ce qui devait devenir un cauchemar administratif et financier pour des milliers d’étrangers, notamment maghrébins, s’est finalement transformé en victoire. Le 30 octobre 2025, l’Assemblée nationale française a rejeté la proposition du Rassemblement national (RN) visant à rétablir le délit de séjour irrégulier, assorti d’une amende pouvant aller jusqu’à 3 750 euros.
Cette mesure, si elle avait été adoptée, aurait bouleversé la vie de nombreux Algériens, Tunisiens et Marocains installés en France, déjà fragilisés par la précarité et les lenteurs administratives.
Une proposition explosive rejetée à la majorité
Déposée par la députée RN Sylvie Josserand, la proposition de loi entendait sanctionner toute personne étrangère majeure séjournant en France « au-delà de la durée autorisée » par son visa.
Concrètement, un simple dépassement de séjour aurait pu entraîner une amende de 3 750 € et jusqu’à trois ans d’interdiction de territoire français.
Un texte à la fois lourd de conséquences pour les étrangers et juridiquement fragile. Dès le début des débats, les députés de la majorité présidentielle et des groupes de gauche ont dénoncé une mesure « inutile et contraire au droit européen ». Après plusieurs amendements de suppression, la proposition a été vidée de sa substance, poussant le RN à la retirer.
Ainsi, le délit de séjour irrégulier, abrogé en 2012 sous la loi Valls, ne fera pas son retour dans le code pénal français.
Une loi jugée contraire aux valeurs républicaines
L’annonce de ce projet avait provoqué un tollé dans tout le pays. Associations, syndicats et collectifs de défense des droits des migrants se sont immédiatement mobilisés pour alerter sur les dangers d’un tel texte.
Des organisations comme la CFDT, la CGT, la Cimade, la LDH, SOS Racisme et Attac ont publié un communiqué commun dénonçant une volonté de « stigmatiser et criminaliser les étrangers ».
Elles ont rappelé que le délit de séjour irrégulier avait été supprimé à la suite d’arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et de la Cour de cassation, qui avaient estimé qu’une telle sanction portait atteinte aux droits fondamentaux.
« Ce texte allait à l’encontre des valeurs de la République et de l’Union européenne, fondées sur la dignité et la proportionnalité des sanctions », a souligné un juriste de la LDH.
Soulagement dans les communautés maghrébines
Pour les ressortissants du Maghreb, cette décision est accueillie comme un véritable soulagement.
Des milliers d’Algériens, de Tunisiens et de Marocains vivent, travaillent ou étudient en France, souvent dans des situations administratives précaires. La perspective d’une amende de 3 750 € aurait plongé beaucoup d’entre eux dans la peur et l’insécurité juridique.
De nombreuses familles redoutaient aussi que la mesure n’alimente un climat de méfiance et de stigmatisation, en associant une fois de plus immigration et délinquance.
Une respiration pour les sans-papiers, un message pour l’Europe
Pour les sans-papiers de France – dont une grande partie travaille dans le bâtiment, la restauration, les soins ou la logistique – cette victoire parlementaire offre une respiration bienvenue.
Elle rappelle que vivre sans titre de séjour n’est pas un crime, mais souvent la conséquence d’un système administratif saturé et inadapté.
Au-delà de la France, ce rejet résonne dans toute l’Union européenne. À l’heure où plusieurs pays durcissent leur politique migratoire, le message envoyé depuis Paris est clair : la dignité humaine demeure la première des lois.





