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Stellantis : enjeux économiques et stratégiques entre l’Italie, le Maroc et l’Algérie

Par Racim Kh
27 juillet 2025

Le groupe automobile Stellantis poursuit son redéploiement industriel à l’échelle mondiale, entre investissements ambitieux au Maghreb et réduction d’activité en Italie. Une stratégie qui soulève des tensions politiques et sociales, tout en reflétant les réalités économiques d’un secteur automobile en pleine transformation.

Berceau historique de marques emblématiques comme Fiat, Lancia ou Alfa Romeo, l’Italie traverse une phase critique dans sa relation avec Stellantis. En 2024, la production automobile y a chuté de 31,7 %, avec la fermeture partielle de plusieurs sites et la suppression de plus de 10 000 emplois depuis la fusion entre PSA et Fiat Chrysler en 2021.

Des rapports médiatiques italiens ont mis en lumière ces décisions qui ont ravivé les critiques du gouvernement italien, mené par la Première ministre Giorgia Meloni, qui accuse Stellantis de négliger ses engagements industriels dans le pays. Les syndicats dénoncent un processus de délocalisation au profit de sites à plus bas coût, alimentant un climat social tendu et une inquiétude croissante quant à l’avenir de l’industrie automobile italienne.

Maroc devient un pilier stratégique pour les véhicules électriques et hybrides

À l’opposé, le Maroc se positionne comme un pôle industriel de plus en plus central dans la stratégie globale de Stellantis. Le site de Kénitra bénéficie d’un investissement massif de 1,2 milliard d’euros visant à doubler sa capacité de production à 535 000 véhicules par an d’ici 2030.

S’inscrivant dans la feuille de route « Dare Forward 2030 », cette expansion vise la production de véhicules électriques et hybrides à bas coût avec un taux d’intégration locale élevé (75 %), en ligne avec les objectifs de compétitivité et de durabilité du groupe. Plus de 3 000 emplois directs devraient être créés, consolidant le rôle du Maroc comme hub d’approvisionnement pour les marchés africain et européen.

Cette montée en puissance du site marocain alimente cependant les critiques en Italie, où l’on voit dans ces investissements une forme de « vase communicant » qui affaiblit les capacités industrielles nationales au profit de pays tiers.

Algérie : une émergence prudente

L’Algérie constitue un autre axe stratégique de développement pour Stellantis. Inaugurée fin 2023, l’usine FIAT de Tafraoui, avec un investissement de plus de 200 millions euros en première phase, a déjà produit plus de 18 000 véhicules en un an, avec une montée en cadence visée à 90 000 unités par an d’ici 2026. Elle emploie actuellement près de 1 600 personnes.

Au-delà de l’assemblage, le groupe mise sur un écosystème local fort, intégrant une sous-traitance nationale et un Pôle National d’Ingénierie pour le développement des compétences et l’innovation locale. L’objectif est de porter l’intégration locale des composants à plus de 30 % et de positionner l’Algérie comme un centre de production à vocation régionale et exportatrice.

Lors de la dernière visite du président Abdelmadjid Tebboune en Italie, La filiale algérienne de Stellantis a signé, le 23 juillet, un partenariat stratégique avec l’équipementier italien SIGIT. Il produira en Algérie de nouvelles pièces plastiques destinées à l’usine FIAT de Tafraoui, en collaboration avec la filiale algérienne Siplast, rattachée à l’Entreprise Nationale des Plastiques et Caoutchouc (ENPC). 

Une stratégie mondiale à double tranchant

Les choix industriels de Stellantis au Maghreb traduisent une logique de compétitivité fondée sur la maîtrise des coûts et la conquête de nouveaux marchés. Toutefois, ils soulèvent de vives interrogations sur l’avenir des sites européens, en particulier italiens, dans le cadre de cette réorganisation.

Le défi pour le groupe réside désormais dans sa capacité à équilibrer ces priorités : optimiser ses performances à l’international tout en préservant un ancrage industriel dans ses pays historiques. Une équation complexe, mais déterminante pour sa légitimité à long terme auprès des gouvernements, des salariés et des investisseurs.

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