Un chiffre glaçant, révélé fin novembre lors de la visite du ministre de l’Énergie Mourad Adjal, expose l’ampleur de la crise énergétique qui étrangle la wilaya de Tizi Ouzou. Sofian Baha, président de la commission Énergie à l’APW, ne mâche pas ses mots : « Plus de 35 000 foyers ne sont pas raccordés au réseau électrique. La situation est dramatique, notamment dans les communes les plus déficitaires. »
Le choc du ministre, des promesses sans calendrier
Lors de sa rencontre avec les autorités locales, Mourad Adjal s’est dit « surpris » par ce bilan, selon Baha. Il a annoncé une « enveloppe financière supplémentaire conséquente » dédiée à l’électrification rurale afin de soulager ces 35 000 foyers, ainsi que 11 000 autres toujours privés de gaz. Le ministre a également donné instruction d’accélérer les dossiers en souffrance, de déplacer certaines lignes bloquant des investissements et d’ouvrir de nouvelles agences dans les daïras sous-desservies.
Mais aucune donnée chiffrée précise ni aucun calendrier concret n’ont été communiqués. Baha tempère : « Le ministre a promis une réponse dans une semaine au wali, mais à ce stade, rien d’officiel. On parle de l’électrification de 15 000 habitants : c’est positif, mais l’urgence concerne surtout les postes sources de Freha 2 — encore en travaux — et de Sidi Naâmane, complètement à l’arrêt. » En l’absence d’engagements formels, les élus restent dubitatifs.
Aredjradj alerte : les stations de dessalement en péril
L’élu APW Hassan Aredjradj a interpellé le ministre sur les réseaux sociaux, soulignant le cœur du problème. Le poste-source d’Arbi, lancé en 2012 puis gelé pendant des années, doit assurer l’alimentation électrique des deux stations de dessalement dites présidentielles : Tamda Ouguemoune et Aït Chafaa (Sidi Khelifa). « Que ferons-nous de ces infrastructures, si longtemps attendues, sans électricité ? » s’interroge-t-il.
Ce poste est également crucial pour le développement des zones d’activités maritimes et pour des secteurs d’habitat rural en forte expansion démographique.
Aredjradj dénonce par ailleurs l’abandon du poste de Sidi Naâmane, « totalement abandonné alors même que son enveloppe budgétaire est disponible ». Il met aussi en cause certaines lignes Sonelgaz traversant des terrains privés, lesquelles déprécient des parcelles déjà rares dans une wilaya à topographie difficile : « Des solutions techniques existent pour éviter ces situations. »
Une crise qui hypothèque l’avenir
Pour Sofian Baha, la pression sur la demande ne cesse de s’intensifier tandis que de nombreuses communes restent asphyxiées. Si Mourad Adjal a visité l’usine ENEL d’Azazga, récemment reprise par Sonelgaz, l’électrification rurale demeure largement lettre morte.
Les 35 000 foyers non raccordés résument l’échec d’une politique énergétique incapable d’accompagner le développement local. Comment envisager le fonctionnement des stations de dessalement, l’implantation industrielle et la construction de logements sans un accès fiable à l’électricité ?
Faute de décisions concrètes et d’échéances claires, l’attente se prolonge — et Tizi Ouzou reste plongée dans le noir.