Le directeur général des biens de l’État, Abderrahmane Kheddi, a annoncé que 139 unités industrielles confisquées dans le cadre d’affaires de corruption ont été transférées à des entreprises publiques, suite à des décisions de justice définitives condamnant leurs propriétaires.
M. Kheddi a précisé, lors d’un entretien à la Radio nationale, que ce transfert s’est opéré contre une contrepartie financière au prix du marché, permettant ainsi de relancer l’activité économique de ces unités et de préserver les emplois qu’elles généraient.
Outre les unités industrielles, de nombreux biens immobiliers saisis dans le cadre de la lutte contre la corruption ont été réaffectés à divers ministères pour servir de sièges administratifs. Des biens mobiliers tels que des véhicules, des équipements à usage administratif, médical ou audiovisuel, ont également été redistribués, selon le même responsable.
Transfert et relance : quelles entreprises concernées ?
Le responsable n’a pas donné de détails sur l’identité des unités concernées. Pour rappel, un représentant du ministère de l’Industrie avait promis, à l’été 2024, de clore ce dossier avant la fin de l’année. Il avait alors déclaré que 108 entreprises et biens confisqués avaient été transférés à des entreprises publiques entre 2022 et 2024.
Toujours selon la même source, 15 entreprises ont vu leur propriété transférée à des entreprises publiques en 2022, dont : 8 unités de production, 5 sociétés de promotion immobilière, deux centres commerciaux et un centre d’affaires.
En 2024, les actifs de 71 autres entreprises confisquées ont été transférés à des groupes publics. Parmi les entreprises citées par Djamel Ghedir, représentant du ministère de l’Industrie, figurent l’unité de production de ciment d’Adrar et plusieurs briqueteries désormais intégrées au groupe industriel des ciments d’Algérie (GICA). Des unités de production agroalimentaire ont été transférées au groupe Agrodiv, tandis que des sociétés du secteur mécanique ont rejoint le groupe Imetal, spécialisé dans la sidérurgie.
Plusieurs unités de production ont également repris leurs activités après leur transfert au secteur public, notamment l’unité de trituration de graines oléagineuses de Jijel (ex-groupe Kouninef), l’usine de production de sucre de Boumerdès et l’unité de fabrication de tubes en acier d’Oran (ex-ETRHB Haddad).
Le même groupe Haddad a vu également sa participation de 17 % dans la société « Vertial » transférée à l’entreprise publique Asmidal (filiale de Sonatrach). En revanche, le sort de la maison-mère ETRHB, appartenant à la famille Haddad, demeure incertain depuis la nomination d’un administrateur à sa tête.
Des secteurs toujours en suspens : médias et industrie automobile en difficulté
Bien qu’ETRHB figure encore dans le registre du commerce, l’entreprise a été vidée de tous ses actifs et employés, selon un ex-salarié du groupe. Près de 3 000 salariés ont continué de revendiquer leurs droits sociaux jusqu’en décembre 2023, date à laquelle ils ont été transférés à la Caisse d’assurance chômage, sans avoir perçu leurs salaires impayés depuis 2019, ni leurs droits sociaux, en raison d’un déficit cumulé auprès de la CNAS. Les dettes de Sécurité sociale du groupe ETRHB s’élèveraient à environ 300 millions de dinars, toutes postérieures à l’emprisonnement du propriétaire.
Dans un communiqué datant de 2021, le syndicat du groupe affilié à l’UGTA déplorait : « L’administrateur judiciaire nous répétait que notre calvaire prendrait fin une fois le jugement rendu. Mais après ce jugement, les employés ont continué à subir des pressions, notamment des congés forcés sans titre. » Le communiqué ajoute : « Malgré l’accord des banques pour financer 14 des 51 projets du plan de charge du groupe, aucune relance n’a été engagée… »
Le groupe médiatique d’Ali Haddad (Dzair TV, Dzair News, Le Temps d’Algérie, Waqt El Djazaïr) a d’abord été cédé aux employés, qui y voyaient une lueur d’espoir. Mais, avec le temps, la plupart des journalistes ont rejoint d’autres médias publics, tandis que les plus marginalisés espéraient toujours une reprise de l’activité. Finalement, le siège du groupe à Saïd Hamdine a été saisi et transformé en siège de la chaîne publique « AL 24 ».
La chaîne Numidia News, appartenant à Mahieddine Tahkout, a disparu sans aucune communication officielle sur son sort. Des rumeurs évoquent un éventuel transfert à l’ANEP (Agence nationale de l’édition et de la publicité), tandis que les employés du groupe Ennahar, fondé par Mohamed Mkadem (Anis Rahmani), actuellement en prison, affirment qu’aucune procédure n’a encore été engagée.
Dans le secteur automobile, la situation reste préoccupante. Hormis l’arrivée de la marque italienne FIAT et le transfert de l’usine IVECO à l’entreprise publique Ferroviaire, le secteur demeure quasi paralysé. Le retour de l’usine KIA à Batna est évoqué, mais les usines Hyundai à Tiaret (ex-Tahkout) et Volkswagen (Mourad Oulmi) restent à l’arrêt, sans information sur leur avenir.