Depuis vendredi, la mer ne lâche plus les côtes algériennes. Cinq jours d’affilée, des vagues désordonnées ont bousculé le littoral et transformé l’été en cauchemar pour les sauveteurs. La Protection civile a multiplié les interventions — près d’un millier à hier mardi — sans pouvoir éviter des dizaines de noyades tragiques. De quoi alimenter la rumeur : et si cette houle persistante cachait un danger plus grave ? Sur les réseaux comme dans les cafés, le mot « tsunami » est même apparu.
Le spectre d’un tsunami en Méditerranée : mythe ou réalité ?
L’alerte au tsunami lancée le 30 juillet dans le Pacifique, après un séisme de magnitude 8,8, a ravivé les inquiétudes. La comparaison avec ce qui se passe en Algérie est suggestive : mer agitée, drames à répétition, climat anxiogène. Mais le pays est-il réellement menacé par un risque de tsunami ?
L’histoire rappelle que la Méditerranée n’est pas étrangère à ces phénomènes. En 365 après J.-C., un séisme en Crète a déclenché des vagues meurtrières jusqu’en Égypte et en Libye. En 1755, le séisme de Lisbonne a provoqué un raz-de-marée qui a atteint le Maroc et l’Ouest algérien. Plus récemment, en 2003, le séisme de Boumerdès (magnitude 6,8) a généré un petit tsunami mesuré jusque dans les Baléares.
Ces épisodes montrent que, si le risque est bien plus faible qu’en océan, il existe bel et bien. Le bassin occidental de la Méditerranée reste traversé par des failles sismiques capables de produire de puissants tremblements de terre.
Quand la météo explique l’essentiel
Pourtant, les spécialistes sont formels : la mer agitée de ces derniers jours n’a pas de lien avec une activité sismique. Elle est le résultat d’un vent d’Est exceptionnellement fort, qui a soulevé une houle longue et persistante. Même après le retour au calme atmosphérique, cette houle résiduelle a continué à frapper les plages, piégeant les baigneurs.
La configuration particulière de la Méditerranée joue aussi un rôle. Ce bassin semi-fermé, bien plus petit que les océans, limite l’amplitude des tsunamis mais accentue les effets des tempêtes. Un vent puissant sur une surface restreinte suffit à générer des vagues soutenues pendant plusieurs jours.
Et la météo réserve d’autres pièges. Les dépressions atmosphériques peuvent provoquer des surcotes, les houles lointaines atteindre nos côtes après des tempêtes situées à des centaines de kilomètres, et les seiches — ces oscillations rapides du niveau marin dues aux variations de pression — sont régulièrement observées.
Reconnaître les signes : houle ou tsunami ?
La confusion est fréquente, mais certains indices ne trompent pas.
• La houle météo : elle dure plusieurs jours, produit des vagues régulières espacées de 5 à 15 secondes, et son intensité suit directement celle du vent. Le danger vient surtout des courants de retour, ces flux invisibles qui aspirent les nageurs vers le large.
• Le tsunami : il se traduit par des vagues géantes mais espacées de longues minutes. La mer peut parfois se retirer brutalement avant l’arrivée de la première vague — un signe d’alerte crucial. Surtout, il est toujours déclenché par un séisme important, ressenti et signalé presque immédiatement.
En clair : face à une mer agitée en été, c’est presque toujours la météo qui commande. La prudence doit se concentrer sur les consignes de baignade et sur une houle trompeusement séduisante. Le risque de tsunami existe en Méditerranée, mais il reste rare, surveillé, et toujours annoncé par les réseaux sismologiques internationaux.