Selon une enquête de Reuters, les banques privées tunisiennes ont cessé d’accorder de nouveaux prêts de plus de 15 ans afin de protéger leur rentabilité, suite à l’entrée en vigueur, en janvier, d’une nouvelle loi gouvernementale réduisant les coûts d’emprunt pour les citoyens.
Selon la même source, cette décision, prise de manière informelle par les directions des banques, vise à limiter les pertes liées à la baisse des taux d’intérêt et à l’obligation d’accorder certains prêts sans intérêts.
« Nous avons reçu des instructions verbales (de la direction de la banque) pour cesser de prêter des prêts à terme fixe avec des maturités supérieures à 15 ans », a déclaré à Reuters un haut responsable d’une banque privée.
Il a déclaré qu’il était clair que les instructions étaient verbales pour éviter tout impact écrit qui pourrait conduire à ce que les banques soient pénalisées par les autorités financières.
« L’objectif est de réduire les risques financiers résultant des prêts à faible coût, qui augmentent la pression sur les banques et la distribution des dividendes attendus aux actionnaires » a déclaré un responsable d’une autre banque privée.
Ces mesures font partie des réformes introduites par le président Kaïs Saïed pour soutenir les ménages dans un contexte de crise économique aiguë, avec une croissance ne dépassant pas 1,4 % en 2024 et des pénuries de produits de base. Le gouvernement a aussi augmenté l’impôt sur les bénéfices des banques de 35 % à 40 %, ce qui, selon Fitch Ratings, pourrait réduire de 11 % les bénéfices combinés du secteur bancaire.
L’analyste financier Mohamed Souilem, ancien cadre à la Banque centrale, estime que cette décision bancaire « pourrait affecter la notation de crédit des banques » et rendre plus difficile l’accès aux prêts immobiliers pour les citoyens. Il alerte également sur la fragilité accrue du secteur bancaire.
En parallèle, le président Saïed a publiquement critiqué les banques pour leurs profits jugés excessifs et appelle à une révision de la loi sur la Banque centrale, afin de permettre au gouvernement d’emprunter directement auprès d’elle, une proposition jugée risquée par les économistes.