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Au CPP, on garde la tête froide, malgré le choc de l’attentat de Tunis

Par Maghreb Émergent
20 mars 2015
CPP Radio M
La Tunisie ne doit pas opposer le sécuritaire à la politique comme en Algérie

CPP Radio M

 

La Tunisie a-t-elle les moyens de faire face au terrorisme ? La question a fait irruption au CPP au lendemain de l’attentat du Bardo, à Tunis. L’actualité algérienne, faite de scandales, a eu de la peine à se frayer une place dans le débat.

Le CPP était sous le choc de l’attentat de Tunis. Au lendemain de l’attentat qui a frappé la capitale tunisienne, le 18 mars 2015, le Café Presse Politique de Radio M a tenté, ou plutôt réussi, à garder distance et lucidité envers un acte qui va pourtant coûter cher à la Tunisie. Hacène Ouali a souligné qu’en ces moments difficiles « la Tunisie a besoin de soutien », d’autant plus que l’attentat du Bardo a « un impact international » qui « ouvre une nouvelle phase dans la lutte contre le terrorisme dans la région ».

Saïd Djaafar a estimé que l’objectif des terroristes était de « déstabiliser l’économie tunisienne et de frapper le processus de démocratisation », notamment en vue de « pousser les courants les plus autoritaires à dire : on ferme la boutique ». Il a insisté sur « l’entente nationale » qui a prévalu en Tunisie pour faire face à l’attentat. Il a rappelé que le parti Ennahdha de Rached Ghenouchi « a dénoncé l’attentat de manière claire », et que « personne ne met en cause Ennahdha ».

Mounir Boudjemaa s’est dit « vraiment pessimiste ». Pour lui, « la Tunisie n’est pas prête à affronter le terrorisme », depuis notamment l’ouverture du « bazar libyen ». Le dispositif de sécurité est « sous-formé », et « n’a ni l’armement ni le dispositif qu’il faut ». Il a rappelé qu’en plus des 3.000 tunisiens partis pour le jihad en Libye, en Irak ou en Syrie, il y a 9.000 autres qui ont été empêchés de partir.

Ne pas opposer politique et sécuritaire

Abed Charef ne partage pas cet avis. Pour lui, la Tunisie a les moyens de faire face précisément parce qu’elle a privilégié le volet politique. Sécuritaire et politique ne sont pas antinomiques, a rétorqué Mounir Boudjemaa. « Il ne faut pas opposer antiterrorisme et démocratie ». Mais le politique est la base, le sécuritaire est un complément technique, a répondu Abed Charef, relevant qu’en Algérie, « ils sont l’un contre l’autre ». Pour lui, « la solution politique ne sous-estime pas le sécuritaire, mais elle met le politique en avant ».  Quant à Hacène Ouali, il a déclaré que la lutte antiterroriste doit être « globale », alors que El Kadi Ihsane soulignait que « le risque sécuritaire a été très bien géré jusqu’à aujourd’hui » en Tunisie.

L’inévitable question de l’appui de l’Algérie à la Tunisie a été aussi abordée. « L’Algérie a raté un grand tournant, celui de l’aide et de l’investissement algérien en Tunisie », a regretté El Kadi Ihsane. L’Algérie a prêté cinq milliards de dollars au FMI, « elle aurait pu les utiliser en Tunisie », a-t-il dit.  C’est un pays qui a fait « un effort énorme sur lui-même pour avancer, cet effort risque d’être bloqué par un environnement international défavorable », estime Abed Charef. « La réponse ne peut être apportée par un pays, mais par toute la communauté internationale », rappelle Hacène Ouali, pour qui « l’urgence, c’est de trouver une solution au cas libyen ». On doit aussi « se sentir concernés », a-t-il dit.

Besoin d’Algérie

Pour Abed Charef, « cette aide est d’autant plus importante que l’expérience tunisienne est à la fois la plus prometteuse et la plus fragile ». Il a souligné l’impact de la crise libyenne sur la Tunisie. « Aujourd’hui, c’est une source de nuisance, mais si le cas libyen est réglé, cela se transformera en un atout pour la Tunisie ». Saïd Djaafar a rappelé que près du tiers de la population libyenne est réfugié en Tunisie.

« Il y a un besoin d’Algérie en Tunisie. Pas uniquement dans l’aspect sécuritaire », a affirmé Mounir Boudjemaa. « La Tunisie n’a pas besoin de mots ni de compassion, mais d’aide concrète. La communauté internationale n’a pas fait grand-chose », a-t-il dit.

El Kadi Ihsane a noté que la Tunisie a réussi à contenir le terrorisme à un niveau relativement bas. Dans un pays en transition, c’est supportable. Il a toutefois souligné que les motifs de radicalisation existent aussi bien dans les pays autoritaires que dans les systèmes démocratiques. En Tunisie, se rejoignent d’ex crédos, « un crédo jihadiste, qui s’exprime aujourd’hui sous le label khalifat », et un « contexte local, avec un courant jihadiste en Tunisie ». Mounir Boudjemaa a noté que le parti Ennahdha « coopère pour empêcher les jeunes de partir » pour le jihad dans d’autres pays.

Victimes collatérales de l’affaire HSBC

Face à cette actualité dramatique, le CPP a eu de la peine à revenir à une actualité algérienne faite de scandales. Deux d’entre eux se sont pourtant imposés dans le débat, l’affaire HSBC, avec les dépôts de ressortissants algériens auprès de cette banque en Suisse, et le procès ajourné dit « Sonatrach I ».

Lyas Hallas, qui a mené l’enquête pour Maghreb Emergent, a expliqué le contexte de ces révélations, et la nécessité de vérifier, recouper, demander aux personnes concernées, avant de publier. Les premières révélations ont paru décevantes, car la liste ne contenait pas de noms de personnalités politiques en vue. Lyas Hallas a refusé d’en dire plus, préférant procéder aux vérifications nécessaires. El Kadi Ihsane a toutefois révélé que le nom d’un ministre du gouvernement Ouyahia, M. Redjimi, figurait dans la liste, et que de nouvelles révélations seraient rapidement mises en ligne sur le site maghrebemergent.info.

Le feuilleton continue donc. Celui de Sonatrach aussi. Mounir Boudjemaa a estimé qu’un procès Saipem, en mai, risquait d’apporter de nouveaux éclairages avant la reprise du procès Sonatrach. Abed Charef s’est déclaré dépité de l’attitude du PDG de Sonatrach Mohamed Meziane, accusé d’avoir mené des actions litigieuses « en famille ».

 

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